L’héroïne, ou diacétylmorphine, est considérée comme un stupéfiant dans tous les pays. Elle est « sniffée », inhalée, mais surtout injectée et provoque euphorie et analgésie, en se liant aux récepteurs opiacés « mu », se substituant ainsi aux endorphines. Sa cinétique rapide (demi-vie de trois minutes) provoque l’effet récréatif recherché rapidement, mais décroît aussi très vite vers le manque ce qui entraîne une accoutumance et une addiction très puissante.
Le traitement d’un individu dépendant aux opiacés vise à administrer une substance similaire à celle de la drogue. Pour cela, deux molécules sont préconisées : la méthadone et la buprénorphine (voir ci-après). Le principe est d’administrer ces molécules à la cinétique lente, sous forme non injectable afin d’obtenir une concentration dans l’organisme située entre le seuil de toxicité (de « défonce ») et de manque. Le but peut être de réduire les risques dû à la consommation d’opiacés, de réduire la consommation voire de l’abolir selon les objectifs fixés.
La méthadone est un opioïde de synthèse aux propriétés analgésiques et un agoniste plein des opioïdes. Elle est rapidement absorbée par l’organisme et a une durée de vie de 13 à 36 heures. Sa longue durée d’action lui procure l’avantage de se substituer au manque causé par l’arrêt de l’héroïne : une dose orale toutes les vingt-quatre heures s’avère souvent suffisante. L’avantage de la méthadone est qu’elle peut être administrée sans délai après la dernière prise d’héroïne et ainsi réduire immédiatement les risques, mais elle peut provoquer des troubles du rythme comme l’allongement de l’intervalle QTc. Le dosage doit être adapté pour chaque patient : s’il est trop élevé il causera des effets indésirables mais en trop faible quantité il ne sera pas efficace. Le métabolisme du patient (lent, rapide, ultra-rapide…) sera un facteur déterminant à prendre en compte, l’objectif étant d’atteindre la phase de stabilisation située entre le seuil d’efficacité et de toxicité. 25 000 personnes sont traitées par la méthadone en France.
La buprénorphine est un agoniste partiel des opioïdes, à effet analgésique également. La buprénorphine à haut dosage (ou Subutex) est utilisée dans la substitution aux opiacés en voie sublinguale. Elle possède plusieurs avantages : moins d’effets indésirables cardiaques et de dépression respiratoire en comparaison avec la méthadone. De plus, la phase de stabilisation est plus facilement atteinte, et l’administration peut se faire tous les deux à trois jours, ce qui permettrait un parcours plus aisé vers un sevrage définitif. En cas de longues addictions avec injection ou de grande précarité du patient, la méthadone est néanmoins préférée. Elle est potentiellement hépatotoxique, et peut être remise en question chez les patients porteurs du VHC. 100 000 personnes sont traitées par la buprénorphine en France.
En plus de ces médicaments, une gestion de la douleur et des comorbidités (VIH, hépatite C entre autres) doit être entreprise. Il s’agit de réduire la morbi-mortalité des toxicomanes, de limiter des comportements et des situations à risque (comme l’utilisation de seringues usagées, l’achat de drogues de rue, des problèmes judiciaires) et de favoriser une réinsertion sociale (comme la recherche d’emploi). C’est pourquoi le traitement de la dépendance passe également par des suivis psychosociaux que l’on ajoute au traitement médicamenteux en lui-même. Il s’agit donc d’une prise en charge globale et multidisciplinaire. Il faut être conscient que les usages de la méthadone et la buprénorphine peuvent être détournés et devenir l’objet d’une toxicomanie, parfois même en primo-consommation (sans consommation antérieure d’autres opiacés). 13,5 millions de personnes dans le monde consommeraient des opioïdes, dont de l’héroïne pour 9,2 millions d’entre eux.
Texte : sb / esanum
Photo : JJ_SNIPER / Shutterstock