Découvrons le système miroir, comme l’a fait il y a moins de trente ans Giacomo Rizzolatti chez les singes. Ce neurophysiologiste italien les a détectés pour la première fois dans le cortex pré-moteur frontal à partir d’enregistrements directs intra-corticaux. Plus tard, des neurones du même type sont retrouvés dans le lobe pariétal inférieur des singes. Ce réseau de neurones interviendrait à la fois dans la motricité physique mais aussi dans les fonctions cognitives tel que l’apprentissage, la compréhension, le langage et aussi dans les interactions sociales: émotion, intention etc…
Ces neurones s’activent lorsque le singe effectue un acte moteur dans un but précis ou perçoit (visuellement ou auditivement) dans son environnement une action ou une émotion quelconque ou qu’il la reproduit mentalement. Ainsi le neurone miroir visuo-moteur d’un singe s’activera de la même manière si celui-ci saisit un objet ou s’il voit un individu saisir un objet. De plus chaque neurone miroir répond à une action précise qui lui est propre et restera insensible à toute autre stimulation.
Mais qu’en est-il chez l’homme?
Il n’existe pas de preuves directes de leur existence car éthiquement il est impossible de placer des électrodes intra-corticales sur un humain. Néanmoins depuis 2010 grâce à l’électroencéphalographie et l’IRM fonctionnelle on peut observer les zones cérébrales qui s’activent en fonction des actes effectués et perçus.
Chez l’humain deux réseaux de neurones miroirs ont été mis en évidence:
-le système fronto-pariétal: dans le cortex pré-moteur et dans le lobe pariétal inférieur (correspondant au réseau découvert chez les singes)
-le système limbique
Contrairement au singe, ces réseaux s’activent même si l’action n’a pas de but précis (lever les bras) ou lorsque l’action est effectuée en absence de son objet (mimer la préhension d’une tasse).
A quoi servent-ils concrètement?
Ces neurones permettent la comparaison des actions extérieures perçues avec le propre répertoire de mouvements de l’individu, qui peut alors les corriger, les améliorer. Il est nécessaire que l’acte soit déjà enregistré dans le répertoire pour qu’il y ait activation des neurones miroirs. En effet lorsqu’un individu entend le bruit de dents croquant dans une pomme, on peut voir sur une IRM fonctionnelle que le circuit fronto-pariétal s’active mais pas lorsque le son perçu est un aboiement: action appartenant à une autre espèce. Leur activation est d’autant plus forte que l’action est connue par l’individu: il y a une corrélation avec l’habileté de l’observateur à la réaliser. Cependant dans le cadre d’un apprentissage par imitation, les neurones miroirs vont s’activer même si le nouvel acte moteur était inconnu auparavant.
Ces neurones accordent aussi de l’importance au but de l’action qui est réalisée, à l’intention: ils ne s’activeront pas de la même manière si un fruit est saisi pour être mangé ou jeté.
Ils interviennent également dans la reconnaissance d’émotion chez autrui permettant le sentiment d’empathie.
Enfin le système miroir pourrait aussi avoir un rôle dans l’apprentissage du langage et l’imitation de la manière de parler, la gestuelle. Les aires cérébrales contenant des neurones miroirs sont très proches (voire parfois confondues) avec les aires du langage de Broca et de Wernicke.
Ces neurones seraient donc un lien privilégié avec les autres individus qui nous entourent pour nous permettre de les imiter, de nous mettre à leur place, mais aussi de les comprendre et de connaître leurs intentions.