Thérapie et évolution
Le diagnostic visuel permet de reconnaître comme alopécie areata les lésions alopéciques presque circulaires, bien délimitées, sur une peau saine et non inflammatoire. L’aspect dermatoscopique confirme le diagnostic, mettant en évidence des « cheveux en point d’exclamation » isolés et groupés, visibles dans les zones périphériques ainsi qu'au milieu des foyers d'alopécie actifs et progressifs. Ces cheveux mesurent typiquement 0,2 à 0,6 cm, présentent des extrémités fracturées évoquant une trichorrhexie et s'amincissent en direction du follicule. Leur présence est pathognomonique de l’alopécie areata.
En raison de l'évolution progressive de la maladie et des follicules pileux encore visiblement préservés, un traitement systémique immunosuppresseur pulsé à base de prednsiolone a été instauré.Le traitement a débuté à une dose de 1 mg/kg de poids corporel, puis a été réduit progressivement sur une période de 10 jours. Trois bolus ont été administrés à un intervalle de trois semaines. Un traitement local complémentaire à base de crème contenant du clobétasol a également été appliqué sur les lésions.
L’alopécie en plaques est définie comme une perte soudaine de cheveux bien circonscrite, d'étendue variable, sans signes d'inflammation ni de cicatrisation. L’incidence dans la population est estimée entre 0,03 et 0,1 %. La maladie survient généralement entre la deuxième et la troisième décennie de vie, avec une répartition égale entre les sexes.
Il s'agit probablement d'une maladie auto-immune caractérisée par une attaque des cellules T CD8 contre les auto-antigènes associés à la mélanogenèse dans les follicules pileux anagènes.
Une transmission polygénique est également probable.
L’alopécie en plaques se manifeste souvent à la suite de facteurs déclenchants tels que des infections, des interventions chirurgicales ou un stress émotionnel. Il existe souvent une association avec la thyroïdite de Hashimoto, le diabète sucré et à le diathèse atopique, comme dans le cas décrit.
Selon l’étendue de la perte de cheveux, on distingue quatre formes cliniques d’alopécie en plaques :
L’alopecia areata circumscripta (80 % des cas) : il s’agit de la forme la plus fréquente, caractérisée par des plaques alopéciques circulaires bien délimitées, comme dans notre cas clinique. Les formes particulières sont une perte isolée des sourcils ou des cils. Une autre forme particulière est l'alopecia areata de type Ophiasis.
Dans ce cas, la perte de cheveux touche les régions latérales du cuir chevelu, la nuque et le front, avec une disposition sinueuse des plaques alopéciques. L’alopecia totalis (10-20 %) se caractérise par la perte complète des cheveux du cuir chevelu. Si toute la pilosité corporelle est touchée, il s'agit d'une alopecia universalis (<10%). L'alopecia diffusa (<1%), rare, est extrêmement difficile à distinguer des autres formes d'alopécie non cicatricielle, notamment de l’alopécie androgénétique (Image 2).
2a
2b
2c
Image 2 : Différentes formes d’alopecia areata : Forme Ophiasis (a), Alopecia subtotalis (b), und Alopecia universalis chez des jumeaux monozygotes (c).
ProLes facteurs d'aggravation du pronostic incluent une progression rapide, une maladie de longue durée, le type d'ophiasis, des antécédents familiaux positifs, une apparition avant la puberté et des maladies auto-immunes associées.
Les traitements visent à éliminer les facteurs déclenchants (stress, infections, médicaments) et à supprimer rapidement l’auto-immunité mal dirigée par des corticostéroïdes locaux ou systémiques. Une alternative consiste à induire un changement du microenvironnement immunitaire via une thérapie de sensibilisation locale pour moduler la réponse cytokinique de type Th1 vers Th2. Les approches thérapeutiques modernes préconisent l’utilisation systémique de biothérapies et d’inhibiteurs de JAK (Tableau 1).
Tableau 1: Principes thérapeutiques et molécules disponibles dans le traitement de l’alopécie en plaques.
.
Principe | Substances actives |
Irritants cutanés non spécifiques (« thérapie de sensibilisation ») | Dithranol |
Immunomodulation topique (« sensibilisation de contact ») | DNCB (Dinitrochlorbenzol), DPCP (Diphenylcycloprphenin) |
Immunosuppresseurs non spécifiques | orticoïdes locaux et systémiques*, PUVA |
Immunosuppresseurs spécifiques | Ciclosporine |
Inhibiteurs de la calcineurine (hors AMM) | Tacrolimus, Pimecrolimus |
Stimulants folliculaires | Minoxidil |
Inhibiteurs de JAK | Baricitinib, Ritlecitinib |
Traitements expérimentaux | Tacrolimus, Cytokines, Biothérapies |
Sous l’effet de l’immunosuppression par trois bolus de stéroïdes et du traitement local, l’activité de la maladie a été stoppée, avec une repousse visible des cheveux dans les zones atteintes (Image 3).
3a
3b
3c
3d
Image 3: Repousse quasi complète des cheveux terminaux dans les zones alopéciques après 12 semaines de corticothérapie par bolus (a-d).
Les facteurs de bon pronostic dans ce cas étaient la courte durée de la maladie, l’absence d’atteinte des autres zones pileuses et des antécédents familiaux négatifs. Toutefois, l’évolution de la maladie reste imprévisible, même sous traitement. Des récidives sont possibles.
Conclusion
L’alopécie en plaques, caractérisée par une chute soudaine de cheveux en plaques circulaires, est généralement un diagnostic clinique évident. Il s’agit vraisemblablement d’une maladie auto-immune, influencée par des prédispositions génétiques et des facteurs déclenchants. Elle est parfois associée à d’autres pathologies auto-immunes. Le traitement repose sur l’élimination des facteurs déclenchants, l’immunosuppression et la thérapie de sensibilisation. Les recherches sur cette maladie sont en cours, et seules les interventions précoces augmentent les chances de récupération de la pilosité terminale.