"L'onychomycose reste une affection courante dont la prévalence augmente. Elle concerne environ 50 % de toutes les affections des ongles", a expliqué le professeur Asja Prohic (Université de Sarajevo, Bosnie-Herzégovine).1 Les facteurs de risque comprennent : les affections concomitantes (tel que le diabète ou les troubles de la circulation sanguine dans les jambes), le tinea pedis (ou “pied d'athlète”), des éléments comme le fait de porter des chaussures imperméables à l'air, des déformations congénitales et enfin une certaine prédisposition génétique. Dans la plupart des cas (60 à 90 %), les agents pathogènes responsables sont des dermatophytes, mais les champignons non-dermatophytes et les levures jouent également un rôle.1,2
Différents critères de guérison ont été définis pour le traitement des mycoses des ongles : la guérison mycologique, qui présente un résultat négatif à la microscopie et à la culture, la guérison clinique, quand l’ongle a une apparence clinique normale, et la guérison complète, englobant les deux résultats. Parmi les facteurs qui pourraient prédire un mauvais pronostic du traitement, on trouve : un âge avancé, une onycholyse sévère, un dermatophytome ainsi que l’existence de maladies immunosuppressives concomitantes. Cependant, l'objectif du traitement n'est pas seulement de parvenir à l'élimination de l'agent pathogène et d'avoir des ongles globalement sains avec une croissance de l'ongle de supérieure à 0,5 mm par semaine, mais aussi d'empêcher la propagation de l'infection.
Le choix du traitement approprié nécessite une approche individualisée, qui est influencée par le degré d'implication du patient, l'ampleur de l’infection, les affections préexistantes, les médicaments pris et bien sûr, les préférences du patient ainsi que le coût du traitement. Le professeur Prohic souligne que pour obtenir des résultats durables, il faut que le patient arrête de prendre les antifongiques précédents. En fonction des différentes lignes directrices, des périodes de traitement de 4 à 8 semaines ou de 3 à 6 mois sont recommandées. Sa recommandation personnelle est d'au moins 2 mois.1,3,4
"Les thérapies orales restent toujours la référence pour l'onychomycose chez les enfants et les adultes, car elles ont une durée de traitement plus courte et des taux de guérison plus élevés par rapport aux antifongiques topiques", explique le professeur Prohic.1 Le traitement oral est particulièrement indiqué lorsque plus de 50 % d'un ongle est atteint, que plusieurs ongles sont touchés, que la matrice de l'ongle est affectée et/ou qu'il existe des facteurs pronostiques défavorables. Bien sûr, les contre-indications doivent également être exclues.
La terbinafine, l'itraconazole et le fluconazole sont les agents actuellement disponibles pour le traitement oral de l'onychomycose, qui agissent toutes sur les dermatophytes et les champignons non-dermatophytes. L'itraconazole et le fluconazole agissent également contre les espèces de Candida. Aucun de ces principes actifs ne doit être utilisé pendant la grossesse et une surveillance de la fonction hépatique est également recommandée. Le fluconazole n'est pas approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) pour le traitement de la mycose des ongles, mais il est largement utilisé aux États-Unis en dehors de ses indications officielles. "La terbinafine reste toujours la référence en matière de traitement oral au regard des taux de guérison mycologique et complète", a expliqué le professeur Prohic. Elle présente des taux de guérison mycologique et complète de 79 % et 59 % pour les ongles des mains et de 70 % et 38 % pour les ongles des pieds.
La liste des nouveaux traitements oraux comprend le posaconazole, le fosravuconazole, l'oteseconazole, le voriconazole et l'albaconazole.5 Le professeur Prohic a souligné que seul le posaconazole est approuvé pour le traitement de la mycose des ongles et ce, uniquement au Japon. "Tous les autres médicaments sont déjà approuvés, mais pour d'autres indications. Principalement pour des infections fongiques très invasives, sauf pour l'albaconazole qui n'est actuellement approuvé par la FDA pour aucune indication". La meilleure efficacité du voriconazole a été observée avec un taux de guérison complète de 67,9 %.
Les traitements topiques de l'onychomycose sont recommandés pour les cas présentant moins de 40 à 50 % d'atteinte de l'ongle, une absence d'atteinte de la matrice, moins de 3 ongles touchés et chez les patients présentant des contre-indications au traitement oral. "Les traitements topiques nécessitent une durée de traitement plus longue et peuvent être moins efficaces que les médicaments oraux. Cependant, ils ne nécessitent pas de tests de laboratoire et leurs effets secondaires sont généralement légers", explique le professeur Prohic. Le traitement topique est plus fréquemment utilisé pour l’onychomycose blanche superficielle et, dans certains cas, pour l’onychomycose sous-unguéale distale. Il est important de conseiller aux patients de rendre la plaque unguéale rugueuse ou de la limer afin de permettre aux principes actifs de pénétrer dans l'espace sous-unguéal. Les agents actuellement utilisés contre les dermatophytes, les champignons non-dermatophytes et les levures sont l'amorolfine, l'éfinaconazole, le tavaborole et le ciclopirox, ce dernier agissant également contre les bactéries. "Selon les études, l'amorolfine présente des taux de guérison mycologique et complète supérieurs", a déclaré le professeur Prohic. De nouveaux traitements tels que la terbinafine topique, le ciclopirox et le tazarotène présentent une meilleure pénétration et des taux de guérison plus élevés, mais d'autres résultats d'études sont encore attendus.
Pour prévenir le problème fréquent de la récidive de l'onychomycose, une prophylaxie avec une application topique bihebdomadaire d'une solution antifongique est recommandée. Enfin, des changements de mode de vie tels que la coupe des ongles, le port de chaussures non étanches à l'air et le lavage à chaud des chaussettes peuvent également contribuer à prévenir les rechutes.