Vers un outil de combat des multi-résistances des cellules cancéreuses?

Le problème majeur des chimiothérapies est le développement de multi-résistances aux médicaments par les cellules cancéreuses. Le principal mécanisme mis en place est la surexpression de canaux membranaires MDR1 permettant d’évacuer le médicament. Les approches visant à inhiber ce mode d’action sont plutôt inefficaces. Le plus prometteur semble

Le problème majeur des chimiothérapies est le développement de multi-résistances aux médicaments par les cellules cancéreuses. Le principal mécanisme mis en place est la surexpression de canaux membranaires MDR1 permettant d’évacuer le médicament. Les approches visant à inhiber ce mode d’action sont plutôt inefficaces. Le plus prometteur semble être d’inactiver la séquence génomique codant MDR1, mais les méthodes actuelles sont temporaires et/ou potentiellement immunogènes.

Dans une étude publiée début mars dans Nature Scientific Reports (DOI : 10.1038/srep22847), une équipe coréenne met en application la technologie CRISPR-Cas9 pour inhiber la surexpression de MDR1 dans un modèle cellulaire de cancer du sein (MCF7/ADR) résistant à la Doxorubicine (Dox). Pour ce faire, les auteurs ont développé un plasmide contenant la séquence codant la nucléase Cas9 ainsi qu’une séquence spécifique (guide) de ciblage de la séquence d’intérêt, MDR1. Après transfection du plasmide dans les cellules modèles, Cas9 va engendrer des coupures dans le gène codant MDR1.

L’analyse de la région d’intérêt après transfection a montré 76.5% de mutation de la séquence d’origine. Au niveau protéique, cela s’est traduit par une diminution d’expression de 25% de MDR1 par rapport à des cellules non traitées. De même, ces effets sont observés par la délivrance intracellulaire du complexe guide-Cas9 par un vecteur lipidique ou par conjugaison avec une protéine facilement absorbable par les cellules (mutation de 51.4 et 69.4% et diminution d’expression de 64 et 45%, respectivement). Le contrôle d’une région différente présentant une homologie de séquence n’a révélé aucune mutation après transfection ou délivrance intracellulaire, validant la spécificité de la méthode.

Concernant le traitement anti-cancer, les cellules MCF7/ADR montrent une faible accumulation de Dox contrairement aux cellules de contrôle non résistantes (MCF7). En revanche, après modification génétique par Cas9, une quantité 4 fois plus importante de Dox est retrouvée dans les cellules MCF7/ADR par rapport à ces cellules non modifiées (p<0.0001). Enfin, la cytotoxicité de Dox (100uM) sur les cellules MCF7/ADR génétiquement modifiées est évaluée à 50-60%.

En conclusion, cette approche de modification génétique du gène codant MDR1 par utilisation de Cas9 se révèle efficace pour contrer la résistance médicamenteuse des cellules cancéreuses. La modification génétique offre un effet irréversible sur la résistance des cellules. Cependant, la sensibilité des cellules résistantes traitées n’atteint pas 100%, mettant en évidence les multiples mécanismes de résistance mis en place indépendamment de la surexpression de MDR1. Il est enfin à noter que le système de détoxification par MDR1 est très utilisé par les tissus sains comme le foie. Une méthode de ciblage spécifique des cellules cancéreuses est donc nécessaire pour envisager ce type de thérapie génique au très grand potentiel.

Texte : jd / esanum

Photo : Lightspring / Shutterstock


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