Une étude menée par des chercheurs australiens de l'institut AFTER (Australian Facility for Taphonomic Experimental Research) a récemment démontré que le corps continuait à bouger après la mort.
Cette discipline récente (de « taphos » qui signifie tombe et « nomos », la loi) a été créée dans les années 1940 par un paléontologue russe. Elle étudie la fossilisation des organismes.
C’est un coin de brousse tenu secret, à l’écart de Sydney, qu’est installée depuis 3 ans la « ferme des corps humains ». Un endroit particulier où est étudiée la décomposition de corps humains - provenant de donneurs - pour reproduire par exemple des scénarios de scène de crime (en plein air, noyades, incendies, etc.)
Auparavant, la plupart des données scientifiques sur la décomposition des corps étaient issues de l'hémisphère nord, où le climat et les insectes peuvent être différents. Cette installation a permis précédemment de montrer que les restes humains, dans cet environnement spécifique, avaient tendance à momifier plutôt qu’à se décomposer. La « ferme » compte actuellement 70 corps.
Il était déjà connu que l'activité des insectes et l'accumulation de gaz peut provoquer des mouvements du corps aux stades précoce et intermédiaire de la décomposition. Mais pour la première fois une caméra a pris des images aériennes d'un cadavre toutes les 30 minutes pendant 17 mois.
Les images obtenues ont été comparées à un système d'attribution de points pour les niveaux de décomposition dans tout le corps afin de déterminer l'intervalle post-mortem (depuis combien de temps la personne était morte).
« Ce que nous avons découvert, c'est que les bras bougeaient considérablement » a indiqué Alyson Wilson, qui mène ces recherches, à l’Australian Broadcasting Corporation.
Si le bras est au début positionné le long du corps, il s’en écarte de plus en plus avec le temps, probablement en raison de la contraction des ligaments qui se dessèchent.
« On s'attendait à un certain mouvement post-mortem au tout début de la décomposition, mais le fait qu'il se poursuive pendant toute la durée du tournage est une surprise totale » précise-t-elle.
Jusqu'à présent, sauf preuve qu'un corps a été déplacé par des animaux ou des personnes, les médecins légistes supposaient que la position d'un corps était celle au moment du décès.
Si suffisamment de cadavres sont étudiés sur une longue durée, la base de données statistiques sur les mouvements post-mortem ainsi créée permettra de comprendre de quelle manière le corps s’est déplacé. Il serea donc possible de reconstituer la position dans laquelle se trouvait le corps au moment du décès.
« Ils cartographieront la scène d'un crime, la position du corps de la victime, toutes les preuves matérielles trouvées et ils pourront comprendre la cause de la mort » a déclaré Mme Wilson à l'AFP.
Un autre intérêt de cette étude est souligné par la Dre Maiken Ueland, directrice adjointe de l'AFTER. L’observation détaillée du processus de décomposition humaine au fil du temps, à intervalles de 30 minutes, permettra de savoir précisément à quel moment certains marqueurs visibles apparaissent. Donc d’améliorer les techniques permettant de calculer le temps écoulé depuis le décès.
Depuis quand la personne est-elle morte ? Dans quelle position était-elle ? Mme Wilson conclut : « C'est important pour les victimes et leurs familles, et dans bien des cas, ça donne à la victime une voix pour raconter sa dernière histoire. »
Ces travaux, dont les résultats n’ont pas encore été publiés, sont le prolongement d’une étude1 , publiée le 17 août 2019 dans Forensic Science International : Synergie.
1- Evaluating the utility of time-lapse imaging in the estimation of post-mortem interval: An Australian case study
Wilson, A., Serafin, S., Seckiner, D., Berry, R., & Mallett, X. (2019).. Forensic Science International: Synergy, 1, 204-210. https://doi.org/10.1016/j.fsisyn.2019.08.003