Dr. Ortiz: Ma première priorité serait d’organiser le système de santé autour de la médecine de ville, et non autour des structures hospitalières. Cette priorité donnée à la médecine libérale s’appuierait sur une meilleure coordination du médecin généraliste et du médecin spécialiste de ville, tout en favorisant une prise en charge pluridisciplinaire et pluri professionnelle au plus près des patients et de leur lieu de vie. Cela nécessiterait une réorientation des moyens consacrés à la santé vers la médecine libérale, donc un investissement massif afin de rendre la médecine libérale mieux organisée, attractive et capable de répondre aux défis du vieillissement de la population, de la multiplication des pathologies chroniques et du maintien à domicile de ces populations âgées et dépendantes.
Ma deuxième priorité serait de recentrer l’hôpital, qu’il soit public ou privé, sur son vrai métier : celui d’avoir un plateau technique performant et de référence. On doit pouvoir recourir à l’hôpital seulement après l’intervention de la médecine libérale mieux organisée. Les relations ville-hôpital doivent aussi s’intensifier, ce qui passe notamment par le développement de statuts et d’activités partagés entre la ville et l’hôpital pour les professionnels de santé.
Ma troisième priorité serait de centrer le rôle de l’Etat sur la définition des grands objectifs en matière de santé : la garantie de la qualité et de l’accès aux soins pour tous, dans le cadre d’une régulation globale et générale. Cela veut dire qu’il faut sortir de l’étatisation permanente de la santé, qui est en train de rentrer dans le domaine régalien. Cela passe donc par le développement de la culture du contrat – par exemple le renforcement de la convention qui régit les rapports entre les médecins libéraux et l’Assurance maladie -, culture qui doit aussi permettre aux professionnels de santé regroupés, de contractualiser avec l’ARS pour des missions transversales ou des missions de santé publique, le tout dans une logique d’objectifs généraux et de moyens alloués, avec des évaluations régulières.
Dr. Ortiz: Dans le domaine de la santé, la première loi à appliquer serait une loi rectificative des deux dernières lois : la loi HPST et la loi de modernisation du système de santé. Cette loi comprendrait, bien sûr, la suppression du tiers payant généralisé et de l’article 99 du PLFSS 2017, qui permet au directeur de la CNAM de décider seul des tarifs de certains actes médicaux. Elle contiendrait également une refonte des GHT et des mesures techniques permettant de replacer l’Etat dans son rôle de décideur des grandes options de la politique de santé, et non dans un rôle réglementaire lui permettant de définir les moindres détails.
Dr. Ortiz: Lutter contre les déserts médicaux nécessite une série de mesures qui, selon les situations géographiques, se combinent de façon variable. Il faut permettre aux jeunes générations de mener une vie professionnelle et une vie personnelle dans les meilleures conditions. Pour ce faire, cela nécessiterait de créer des conditions de vie professionnelle acceptables : une meilleure organisation de la Permanence des Soins (PDSA), un regroupement des médecins encouragé et soutenu (y compris par les outils du net), une valorisation financière de l’activité médicale et du statut social du médecin libéral, le développement de l’exercice multisite, des temps partagés entre le statut libéral et le statut salarié en particulier dans les structures hospitalières, la prise en compte de la vie personnelle du médecin (poste de travail pour le conjoint ou la conjointe, scolarisation des enfants, etc.). Le tout doit être accompagné de mesures financières incitatives afin de rendre l’exercice médical dans les zones sous-dotées plus valorisant…
Dr. Ortiz: Tout d’abord, une remarque préalable : le déficit des Caisses d’Assurance maladie est surtout un déficit des recettes lié à une activité économique en grande difficulté.
Il faudrait, d’une part, que les Caisses d’Assurance maladie se comportent en véritables « acheteurs de soins ». A partir de critères de qualité, de sécurité et d’accès aux soins pour tous, les Caisses d’Assurance maladie devraient acheter les soins produits au mieux-disant. L’équité tarifaire deviendrait alors la règle, tant pour les structures hospitalières que pour les soins de ville.
Il faudrait, d’autre part, encourager les démarches de pertinence et les valoriser, afin d’éviter les redondances. Cela passe par une meilleure transmission des informations médicales entre les différents acteurs de la prise en charge du patient. Le fameux DMP, toujours dans les limbes des millions engloutis, devrait être une priorité absolue.
Texte : esanum / pg