Personne n'a encore été capable de déchiffrer ces signaux directement. Récemment, trois groupes de recherche ont fait des progrès dans la transformation des données provenant d'électrodes placées chirurgicalement dans le cerveau en parole générée par ordinateur.
De nombreuses personnes dans le monde entier vivent sans avoir la possibilité de s'exprimer. Aujourd'hui, ces personnes, qui ont peut-être perdu leur capacité de parler à la suite d'un AVC ou d'une autre pathologie, peuvent utiliser leurs yeux ou faire d'autres petits mouvements pour contrôler un curseur ou sélectionner des lettres sur un écran. La technologie veut aller plus loin et construire une interface cerveau-ordinateur capable de recréer directement la parole de ces personnes. De cette façon, le patient peut regagner beaucoup plus, par exemple le contrôle du ton et de la flexion de la voix, ou la capacité d'interagir rapidement dans une conversation.
Au cours des derniers mois, trois groupes de chercheurs ont réussi à prendre des mesures importantes pour convertir les données brutes saisies par les réseaux d'électrodes (implantées chirurgicalement dans le cerveau) en mots et phrases informatisés. Cependant, aucune des trois équipes, à l'aide de modèles informatiques connus sous le nom de réseaux de neurones, n'a réussi à mettre au point un système capable de verbaliser ce que les sujets étudiés pensaient.
L'équipe dirigée par Nima Mesgarani de l'Université Columbia à New York a étudié cinq personnes épileptiques. Une autre équipe, dirigée par les neuroscientifiques Miguel Angrick de l'Université de Brême et Christian Herff de l'Université de Maastricht, s'est basée sur les données de six personnes ayant subi une chirurgie du cancer du cerveau. Enfin, le neurochirurgien Edward Chang et son équipe de l'Université de Californie à San Francisco ont reconstruit des phrases entières d'activité cérébrale chez trois patients épileptiques.
Les résultats sont encourageants, mais les problèmes à résoudre sont complexes.
La façon dont ces impulsions nerveuses sont traduites en sons de parole varie d'une personne à l'autre. L'intelligence artificielle devra donc être entraînée pour chaque individu en particulier.
L'intelligence artificielle fonctionne mieux lorsqu'elle est alimentée par des données extrêmement précises, ce qui explique pourquoi il est nécessaire de réaliser une incision pour installer les électrodes. Actuellement, les chercheurs ne peuvent réaliser leurs expériences qu'en tirant parti des interventions neurochirurgicales prévues à d'autres fins (tumeurs cérébrales, schizophrénie, etc.).
Comment ces intelligences artificielles fonctionneront-elles lorsqu'elles travaillent directement avec des personnes qui ne peuvent pas parler ? Les signaux cérébraux non accompagnés d'un son externe correspondant à l'activité cérébrale peuvent être difficiles à interpréter pour un ordinateur (par exemple, il sera difficile de reconnaître où ce "discours interne" commence et se termine).
Le décodage du discours imaginaire nécessitera un effort énorme, selon les experts.
Un travail fascinant donc, mais dont la communauté scientifique n’as pas encore résolu tous les mystères.
Sources : Servick K. Les ordinateurs transforment les signaux neuronaux en parole. Science. 2019 Jan 4;363(6422):14. doi : 10.1126/science.363.6422.14.