Q1.La loi Macron prévue pour ce mois pourrait mettre fin au monopole officinal pour renforcer la concurrence et le pouvoir d’achat des Français. En quoi la mise en vente des médicaments en grandes surfaces pourra-t-elle concrètement augmenter le pouvoir d’achat ?
Tout d’abord, il faut souligner que personne ne connaît à ce jour les orientations de la loi concernant l’évolution des professions réglementées. La Ministre de la Santé s’est clairement exprimée contre une sortie des médicaments des officines et je m’en tiens, faute d’éléments contraires, à cette position.
Concernant le pouvoir d’achat, je tiens également à rappeler qu’une concurrence existe entre les officines. les patients ont le choix de leur professionnel de santé selon les critères qu’ils déterminent par eux même. Est-ce qu’une ouverture du monopole officinal apporterait une plus-value en matière de pouvoir d’achat , cela reste encore à démontrer. Je rappelle que selon une étude de l’AFIPA (Association française de l’industrie pharmaceutique pour une automédication responsable) les médicaments en libre accès en France sont parmi les moins chers d’Europe y compris dans les pays permettant la vente de médicament en grande surface. Quand bien même, si l’on s’en tient aux chiffres de ses promoteurs, une autorisation de la vente des médicaments à prescription médicale facultative générerait une économie de 4€ par an et par habitant.
Est-on prêt à déstabiliser l’équilibre d’un réseau qui fonctionne pour une économie aussi minime ?
Q2. L’exemple de la Suède et sa volonté de faire marche arrière en retirant notamment le paracétamol de la vente en grande surface, semble confirmer votre crainte de l’automédication qui accompagnerait la fin du monopole officinal. Pensez-vous que cela pourrait avoir un poids quelconque dans la décision des autorités françaises ?
Je l’espère. Notre préoccupation en tant qu’Ordre est exclusivement centrée sur la santé publique. Or, on ne peut oublier que le médicament demeure un produit dangereux quand il n’est pas utilisé à bon escient. Le paracétamol peut générer des troubles hépatiques et doit respecter des conditions d’emploi très précises.
Les médicaments à prescription médicale facultative peuvent sembler anodins à la majorité de la population. Ils demeurent cependant des produits nécessitant des précautions particulières et un cadre de dispensation très strict. Seule l’officine m’apparaît à même d’offrir ce cadre qui garantit une sécurité optimale pour les patients.
Q3. Quelle différence faite vous entre la vente de médicaments en grande surface et celle en ligne ? Les deux ne représentent-elles pas les mêmes dangers pour les officines et les patients ?
La vente des médicaments en ligne se fait par une pharmacie, depuis une officine et avec les mêmes garanties, devoirs et obligations pour le pharmacien. Ainsi, le code de déontologie et le code de la santé publique s’appliquent de la même manière suivant que vous alliez acheter un médicament dans une pharmacie ou sur un site internet dûment autorisé. Le pharmacien devra notamment s’assurer de l’identité de la personne et poser les questions nécessaires pour vérifier que la dispensation peut s’effectuer dans de bonnes conditions. Mais vous avez raison, cela suppose une vigilance particulière pour le patient qui doit s’assurer que le site sur lequel il effectue son achat est bien un site légal et sûr. Une seule manière de s’en assurer : aller vérifier sur le site de l’Ordre ou celui du Ministère de la santé.
Q4. La Ministre de la santé a lancé la vente de médicaments à l’unité dans certaines pharmacies. Une expérimentation visant à réaliser des économies et diminuer la consommation d’antibiotiques. Cette mesure vous semble-t-elle pertinente ? Quelles solutions proposez-vous pour réaliser de réelles économies ?
Nous partageons tous l’objectif d’une réduction de la consommation des antibiotiques et du gaspillage pouvant se produire dans la délivrance de boîte. Une expérimentation est lancée. L’ordre y souscrit car cela permettra d’objectiver le débat et de connaître précisément le volume en question, l’origine du surnombre et le temps passé par le pharmacien pour procéder à cette délivrance à l’unité. Nous verrons les résultats et serons donc en mesure d’apprécier l’opportunité de généraliser la mesure.
Ceci étant dit, je comprends tout à fait le scepticisme de mes confrères quand ils mettent en regard le temps passé avec l’économie possible. Le sur-mesure n’a jamais été plus économique que le prêt-à-porter. Il faut néanmoins se laisser le temps d’apprécier le système proposé et de vérifier sa faisabilité et son utilité.
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