Si le patient refuse la substitution que le pharmacien lui propose il perd droit au tiers-payant et se voit dans l’obligation d’avancer les frais dans l’attente du remboursement par sa caisse. Les patients se sont depuis, habitués à cette question : “je vous mets le générique?”. Une question qui n’a pas lieu d’être si le médecin précise par la mention NS (Non Substituable) que le médicament ne peut être substituer. Une réalité qui donne lieu à de nombreuses questions, le Docteur Duquesnel, Président de l’UNOF-CSMF parle de “l’opacité” relatives aux génériques et aux questions qu’ils soulèvent, non seulement chez les médecins mais aussi chez les patients. Retour sur ces médicaments parfois controversés.
Lorsqu’un médicament n’est plus sous couvert du brevet qui le protégeait, sa molécule est reprise par d’autres laboratoires, qui produisent alors le médicament, dit générique, correspondant. Le princeps et son générique contiennent ainsi la même molécule mais les caractéristiques qui les différencient sont nombreuses. Un test de bioéquivalence existe afin d’établir l’efficacité et la sécurité des génériques par rapport au princeps et ainsi délivrer une autorisation de mise sur le marché. Le procédé est bien plus rapide que celui auquel le princeps est soumis et participe à la méfiance des patients et médecins. “Sous réserve des études réalisées pour la bioéquivalence et en supposant que l’observance soit suivie si on regarde les chiffres tentionnels et les résultats de valeurs biologiques on observe des valeurs différentes. Donc pour nous la bioéquivalence n’est pas suffisante, surtout lorsque l’on observe chez nos patients des différences de tolérance et d’efficacité.” nous explique le Docteur Duquesnel.
La mention NS permettrait donc aux médecins de s’assurer que leurs patients reçoivent le médicament qui leur convient le mieux. Mais d’un point de vue économique, cette solution ne convient pas à tout le monde, car les médicaments génériques sont moins coûteux que les originaux. Les laboratoires qui les produisent n’ont pas déboursé de frais de développement ce qui implique que les médicaments génériques sont vendus moins chers que leur princeps. Des enjeux dont le Président actuel de la CNAM, Frédéric van Rockenghem a conscience, déclarant ainsi en mai dernier vouloir identifier et pénaliser les médecins qui abusent de la mention NS sur leurs ordonnances. Une annonce qui selon le Président de l’UNOF-CSMF est surtout “de l’affichage” : “Je pense que les médecins peuvent avoir des raisons d’utiliser la mention NS et l’assurance maladie peut très bien contrôler mais si un patient fait un accident grave à cause d’un générique la responsabilité médico-légale reviendra à qui Au médecin… Sauf si le médecin a la confirmation que la responsabilité du directeur de la CNAM ou du médecin conseil (et non la sienne) sera mise en cause en cas de réaction, d’accident graves. Si c’est la responsabilité du médecin traitant, moi j’en vois peu prêts à prendre le risque. Du coup je pense qu’il s’agit surtout d’un effet d’affichage du Président de la CNAM afin de faire pression pour diminuer le nombre de NS, mais je ne peux pas l’imaginer engager des actions contre les médecins. Ce serait prendre trop de risque vis à vis des patients.”
Si la question des coûts est devenue centrale, il convient de rappeler que c’est l’État qui fixe les prix des médicaments. C’est pourquoi, selon le Docteur Duquesnel, “le médecin généraliste / traitant considère qu’il n’a pas à être pris en otage car ce n’est pas lui qui fixe les prix. Se faire imposer des contraintes en terme de choix de médicaments pour des questions de coûts est quelque chose qui peut dépasser le médecin. Finalement c’est à l’État de prendre ses responsabilités et à partir du moment où un médicament est généricable il devrait fixer un prix pour que tous les génériques soient au même prix que le princeps ou l’inverse… Les médecins ne fixant pas les prix des médicaments, ce n’est pas une problématique qui les concerne.”
Il ne faut néanmoins pas restreindre les générique à une question économique, car ces derniers présentent des risques réels pour certains patients. En effet, le patient est confronté à des médicaments dont la taille, la couleur, l’emballage… varient en fonction des marques et cela provoque des erreurs plus ou moins graves. “La position NS est surtout valable pour les personnes âgées” précise le docteur Duquesnel, avant d’ajouter: “on s’aperçoit que les erreurs sont plus fréquentes quand on leur change le générique. Les patients dont les médicaments ne changent pas ont une certaine autonomie, qui est perdue lorsque le générique change. Et cela nous a amenés à envoyer des infirmières préparer les médicaments des patients. Donc finalement on faisait des économies en terme de coût de prescription, mais de nouvelles dépenses étaient engendrées puisque le patient ne pouvait plus préparer seul ses médicaments. Il est vrai que le lien n’a jamais été établie entre les deux et aucune étude n’a été faite mais c’est constaté. Finalement, dans certains cas, un médecin qui note NS fait réaliser plus d’économies qu’en faisant venir une infirmière à domicile. On pourrait parler de cas isolés, mais quand vous rencontrez cette problématique plusieurs fois alors cela devient général. Et comme on ne peut pas contrôler chaque patient à domicile prescrire les princeps permet d’éviter les erreurs.”
Mais les patients âgés ne sont pas les seuls à rencontrer des problèmes avec les médicaments génériques : alors que le médicament princeps porte un nom qui favorise sa mémorisation – le nom de marque – le générique quant à lui porte celui, plus difficile à retenir, de sa molécule. Il est, par conséquent, fréquent que le patient ignore quel médicament il prend. Différents laboratoires peuvent produire des génériques du même princeps, “et non seulement toutes les pharmacies n’ont pas les mêmes génériques, mais on voit aussi très bien que les pharmacies signent aussi des contrats avec les industries (même s’il existe des clauses dans les conventions je crois). Donc le patient, même s’il reste fidèle à sa pharmacie se retrouve avec des médicaments différents. Et cela redouble sa confusion. Le meilleur exemple c’est avec la pilule, les patientes sont souvent incapables de nous dire laquelle elles prennent et nous ne pouvons pas prescrire si le patient ne sait pas ce qu’il prend. Dans ce cas nous avons intérêt à l’avoir noté dans le dossier. ” nous explique le Docteur Duquesnel.
Si les politiques de réduction des coûts de santé mises en place encouragent la prescription et la délivrance des médicaments génériques, elles semblent passer outre le principe de précaution pourtant si cher aux Français. Le légitime débat sur leur efficacité reste donc ouvert.
Texte : esanum / pg
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