Après les résultats d’une méta-analyse récente ayant démontré l’intérêt du cannabis médicinal pour traiter la douleur neuropathique chronique, une maladie invalidante et difficile à prendre en charge, une équipe de chercheurs des universités de Californie et de New York ont réalisé une étude de faisabilité économique visant à analyser le modèle coût-efficacité de la pharmacothérapie adjuvante au cannabis pour la neuropathie périphérique chronique.
L’article en question est paru dans le Journal Cannabis and Cannabinoid Research et est intitulé « Modèle coût-efficacité pour le cannabis fumé adjuvant dans le traitement de la douleur neuropathique chronique ». Les chercheurs ont ainsi procédé, grâce à une simulation informatique, à une comparaison des coûts des soins habituels en première, deuxième et troisième ligne avec ceux pris en charge avec du cannabis fumé. L’efficacité et les effets indésirables étaient étayés par des essais cliniques d’études antérieures et le coût du cannabis appliqué dans le modèle s’appuyait sur le prix de détail du marché.
Les publications scientifiques démontrant l’efficacité du cannabis médicinal dans le traitement analgésique de plusieurs maladies, notamment de la douleur neuropathique chronique, sont de plus en plus nombreuses à paraître. Selon une méta-analyse récente, l’effet analgésique du cannabis inhalé serait comparable à celui de la gabapentine. Selon les recommandations sur la prise en charge thérapeutique de la douleur neuropathique chronique, les cannabinoïdes ne devraient être proposés qu’en troisième intention. Parallèlement, à ce jour, un nombre croissant de patients consomment du cannabis pour des raisons médicales. Ces dépenses sont à leurs charges puisque la réglementation actuelle interdit aux régimes de santé de couvrir les dépenses liées aux cannabis médicinal.
Autre point important ; cette étude serait la première à évaluer la rentabilité selon un modèle coût-efficacité du cannabis médicinal fumé dans le traitement d’une maladie chronique. Des études antérieures ont évalué la rentabilité des nabiximols et du dronabinol dans le traitement de la sclérose en plaques. Les résultats de cette nouvelle analyse pourraient ainsi avoir une incidence sur la prise en charge de la douleur neuropathique chronique.
Selon les critères posés, le traitement serait considéré comme rentable lorsque le rapport entre les coûts et les avantages différentiels pour la santé, connu sous le nom de rapport coût/efficacité différentiel (ICER) est inférieur à la volonté du prestataire de payer pour ces bénéfices sur la santé. Inversement, le traitement est considéré comme dominé, et catégoriquement non rentable, lorsqu’il est moins efficace, mais plus coûteux qu’une alternative, et largement dominé lorsqu’il existe une autre alternative de traitement aux soins habituels avec une valeur ICER inférieure.
Daniele Piomelli, rédacteur en chef et PhD à l’Université de Californie à Irvine a déclaré « la crise des opioïdes se poursuivant sans relâche, il est essentiel de comprendre si le cannabis pourrait offrir une approche sûre, efficace et économiquement rationnelle de la gestion de la douleur. Cet article propose de nouvelles données qui aideront à évaluer cette possibilité ».
Selon les seuils des dispositions de paiement proposés et qui vont de 110 000 $ à 300 000 $ par QALY (années de vie pondérées par la qualité), cette analyse montre la rentabilité du cannabis médicinal pour améliorer le traitement de deuxième intention de la douleur neuropathique chronique. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour explorer les avantages à long terme du cannabis fumé et la standardisation de son dosage pour la douleur neuropathique chronique.
Sources : A Cost-Effectiveness Model for Adjunctive Smoked Cannabis in the Treatment of Chronic Neuropathic Pain