“L’alcool est un sujet de santé comme les autres”
L’alcool est la cause directe ou indirecte de plus d’une soixantaine de maladies et de 49 000 décès par an en France. Le médecin généraliste s'inscrit en première ligne pour réduire les risques liés à l'alcool.
Les conséquences de l'addiction à l’alcool
- L’alcool est la cause directe ou indirecte de plus d’une soixantaine de maladies, ainsi que de 49 000 décès par an en France1.
- Sa consommation est souvent banalisée, voire valorisée (binge drinking festif, usage quotidien, rite d’initiation chez les jeunes, tradition régionale, culturelle ou professionnelle... )2.
- Les niveaux de consommation sont actuellement élevés chez les jeunes et les séniors1.
- Toute exposition est à risque. Le risque de cancer, d'accident et de suicide augmente dès les premières quantités consommées, avec un effet-dose2.
- L’alcool peut affecter fortement la vie de l’entourage direct des personnes consommatrices, notamment de leurs enfants.
- Chacun peut diminuer ses risques. Toute action en ce sens, aussi infime soit-elle en apparence, peut avoir un impact positif, pour soi-même et pour son entourage2.
Aborder le sujet de l'alcool avec tous les patients, tout au long de leur vie
La Haute Autorité de Santé a publié un ensemble de fiches sur le thème Agir en premier recours pour diminuer le risque alcool – Repérer tous les usages et accompagner chaque personne. L’objectif est de faire de l’alcool un sujet de santé comme les autres, qui concerne tous les usagers du système de santé tout au long de leur vie et pas seulement en cas de complication apparente ou d’usage problématique.
Il est essentiel d’ouvrir le dialogue pour aborder le sujet de l'alcool de façon simple, systématique, non stigmatisante. Créer un climat de confiance est le meilleur moyen de susciter l’adhésion pour amener un changement.
Le médecin généraliste est encouragé à évaluer au moins annuellement le risque lié à l'alcool de ses patients. A noter qu’une vigilance particulière doit être accordée face à un changement de situation (deuil, grossesse, divorce, retraite…). Des outils d'évaluation existent, comme les questionnaires de “Repérage Précoce et l’Intervention Brève dans le cadre des conduites addictives (tabac, alcool, cannabis)“ ou CAGE-DETA mais il convient surtout de lancer la discussion. Un échange permettra d'identifier le rapport à l’alcool de la personne (fréquence, habitudes, rituels de consommation, effets recherchés) ainsi que de ses circonstances de vie, qui vont influer son état motivationnel (ressources et besoins, environnement, entourage, style de vie, état psychosocial, isolement…).
Accompagner les personnes
Si dans certaines situations le sevrage ou la forte diminution des consommations est incontournable et nécessite un accompagnement poussé (groupe de soutien, médication, psychothérapie, cure de désintoxication, hospitalisation…), il y a d’autres façons de réduire les risques liés à l’alcool3.
Informer est essentiel pour faire prendre conscience, que, dès les premiers verres et y compris pour les buveurs qui se considèrent comme occasionnels, des risques de maladie physique et psychique existent, mais aussi des risques d'accident ou de comportements dangereux. Chaque changement vers une consommation diminuée ou plus raisonnée, même minime, aura un effet bénéfique pour la personne.
Faire évoluer les pratiques des patients alors que l'alcool est un psychotrope banalisé est un défi difficile à relever. Toute proposition de changement doit s'inscrire dans la mesure de ce qui est acceptable pour la personne à ce moment précis de sa vie. Il est toujours bénéfique d'aider cette personne à porter un regard différent sur ses habitudes et à réfléchir avec elle sur comment dé-ritualiser sa consommation, ainsi qu'à des alternatives pour obtenir des effets similaires (lutte contre le stress, intégration au groupe...).
Même sans diminution des quantités consommées, le fait d'apprendre à limiter les dangers liés à la consommation peut parfois déjà être un pas en avant. Un médecin généraliste peut, par exemple, face à une personne pratiquant l’alcoolisation ponctuelle importante (API, binge drinking en anglais), sensibiliser à la nécessité d’être avec un entourage de confiance, de ne pas conduire, de s’hydrater et s'alimenter ou encore d’éviter toute association à d’autres substances psychoactives3.
Intégrer la question de l’alcool dans le suivi médical de routine permet de sensibiliser, prévenir et accompagner sans jugement, ce qui ouvre la voie à l'adoption de comportements plus sains et responsables.
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Réduction des dommages associés à l’alcool : les stratégies de prévention et d’accompagnement soulignées par l’expertise collective Inserm ; Santé Publique France ; Septembre 2022
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Outil d’aide au premier recours : repérer et accompagner pour diminuer le risque alcool pour tous ; Haute Autorité de Santé, 2023
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Diminuer le risque alcool pour tous : les points critiques en premier recours ; Haute Autorité de Santé, 2023
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Réduire les risques et les dommages des alcoolisations ponctuelles importantes (binge drinkings) ; Haute Autorité de Santé, 2023