Une équipe pilotée par des chercheurs de Google Artificial Intelligence a développé un algorithme capable de détecter le cancer du poumon avec un taux de réussite de 94,4 %. Les résultats de l'étude « End-to-end lung cancer screening with three-dimensional deep learning on low-dose chest computed tomography » ont été publiés dans la revue Nature Medicine le 20 mai 2019.
Aux États-Unis, avec près de 160 000 décès en 2018, le cancer du poumon est le plus meurtrier. Le diagnostic précoce s'avère essentiel, afin de contrôler la progression de la tumeur et d’améliorer l'état clinique des patients. Depuis 2013, la tomodensitométrie à faible dose (low-dose computed tomography : LDCT) est devenue la référence pour le dépistage des populations à haut risque. Cette recommandation est basée sur des essais montrant que la LDCT peut, pour cette population, réduire la mortalité liée au cancer du poumon de 20 à 43 %. Cependant, un pourcentage élevé de faux positifs et de faux négatifs peut encore retarder le diagnostic, avec des conséquences parfois dramatiques.
Les recommandations concernant l'interprétation des images par les radiologues sont notamment basées sur la taille, la densité et la croissance des nodules détectés. Mais le Dr Lily Peng, qui a participé à l'étude, constate que « le cancer à un stade très précoce est minuscule et peut être difficile à voir ». Elle ajoute que « plus de 80 % des cas de cancer du poumon ne sont pas détectés suffisamment tôt. »
Cette équipe a donc utilisé l'intelligence artificielle (IA) pour détecter le cancer du poumon sur les images des scanners LDCT. Les chercheurs ont développé un algorithme utilisant le deep learning, en utilisant les images de 42 290 scans actuels ou antérieurs des patients. L'ensemble du processus de deep learning est similaire à celui d'un élève à l'école : stockage de données, leçons, tests d'évaluation, etc. L'algorithme a ensuite été utilisé pour analyser 6 716 cas : sa précision a été de 94,4 %.
Les chercheurs ont ensuite comparé cette performance à celle de 6 radiologues expérimentés (8 ans d’exercice en moyenne). Lorsque les scans antérieurs des patients n’étaient pas disponibles, l’IA a supplanté les radiologues, avec une réduction de 11 % des faux positifs et de 5 % des faux négatifs. Lorsque des scans antérieurs étaient disponibles, les performances de l’IA et des radiologues étaient comparables.
Autre résultat prometteur à mettre au crédit de l’IA, sa faculté à détecter très tôt l’apparition des cancers. Elle a ainsi pu repérer un cancer sur un scanner effectué un an avant que le diagnostic ne soit posé. Une détection très précoce qui d’après le Dr Peng pourrait améliorer le taux de survie de 40 %.
Ces chercheurs sont conscients qu'il ne s'agit que d'une première étape. Il reste beaucoup à faire avant que l'algorithme puisse être largement utilisé pour le diagnostic. En effet, si un radiologue commet une erreur il ne cause des dommages qu’à une seule personne. Mais si l'algorithme se trompe, ce sont des milliers de patients qui peuvent être impactés. Un tel système doit donc être rigoureusement testé avant d'être déployé pour un dépistage de masse.
Autre frein, la possible méfiance des médecins envers l’IA. Pour Shravya Shetty, ingénieur informaticien de Google et co-auteur de l'étude, « une solution pour gagner la confiance des radiologues serait de leur montrer comment le système fonctionne. »