Le diagnostic de l’addiction est défini par le DSM-5 (2013) selon des critères bien précis, notamment: perte de contrôle de soi, interférence de la consommation sur les activités scolaires ou professionnelles, poursuite de la consommation malgré la prise de conscience des troubles qu’elle engendre… Le tabac, l’alcool et le cannabis sont les substances psychoactives les plus consommées en France. Loin derrière: les opiacés (héroïne, morphine), la cocaïne, les amphétamines et dérivés de synthèse. Il existe également des addictions liées à des activités: les jeux d’argent, les jeux vidéo, le sexe ou encore les achats compulsifs. L’addiction est un problème majeur de santé publique, de par sa banalisation actuelle notamment auprès des jeunes et les nombreuses conséquences socio-économiques qu’elle engendre. Cet article ne traitera que des addictions au tabac, alcool et cannabis.
La France est selon l’OCDE, le troisième consommateur mondial d’alcool avec 11,7 litres d’alcool pur/habitant/an (2012). En 2013, un individu sur dix en a consommé au moins une fois dans sa vie et plus de huit sur dix au cours de la dernière année. En revanche, seule une minorité en déclare un usage régulier (8,8M) ou quotidien (5M). Cependant, d’après l’INSERM de nouveaux comportements d’alcoolisation, notamment dans les tranches d’âge les plus jeunes, se confirment, se traduisant par une augmentation des épisodes d’ivresse, des consommations à risque et de d’alcoolisation ponctuelle importante (API) (définie par la prise d’au moins six verres pour les adultes et cinq pour les adolescents en une même occasion). À 17 ans, 59 % des garçons et des filles rapportent avoir déjà été ivres au cours de leur vie et 53 % déclarent avoir vécu au cours du mois précédent l’enquête un API. Les API au cours du mois sont en hausse continue : 46 % en 2005, 53 % en 2011.
En raison de son potentiel addictif très élevé, le tabac obéit dans la plupart des cas à une règle du « tout ou rien ». En 2013 la majorité des expérimentateurs ne fument plus mais ceux qui ont continué sont, pour la
plupart, des consommateurs quotidiens, dont le nombre est estimé en 2011 à 13,4 millions parmi les 11-75 ans. Chez les adolescents à 17 ans, 30 % des filles et 33 % des garçons sont fumeurs quotidiens.
La France se situe en 2011 parmi les pays européens où la prévalence du tabagisme chez les jeunes âgés de 16 ans est la plus élevée.
Le cannabis est de très loin la substance psychoactive illicite la plus consommée en France. En 2013 près de 13,4 millions des 11-75 ans l’ont expérimenté, parmi lesquels près d’un tiers en a fait usage au moins une fois dans l’année. Le nombre de consommateurs réguliers est de l’ordre de 1,2 million, dont la moitié d’usagers quotidiens. En 2011, 42 % des adolescents de 17 ans ont déjà fumé du cannabis au moins une fois (39 % des filles et 44 % des garçons) dont 5 % présenteraient en 2011 un risque d’usage problématique voire de dépendance : 7 % des garçons et 3 % des filles. La France, avec le Canada, la République tchèque, la Suisse, les États-Unis et l’Espagne, se situe en 2011 parmi les pays où la prévalence de consommation de cannabis chez les adolescents est la plus élevée.
Les conséquences d’une consommation régulière et/ou d’une addiction peuvent avoir des conséqences directes (coma éthylique, violence, passage à l’acte) et à long termes. Pour l’alcool: augmentation du risque de cancer et maladies cardiovasculaires, notamment chez l’adolescent qui est très vulnérable aux intoxications massives et à ses effets neuro toxiques au niveau structurel (neurogénese), fonctionnel ( troubles de l’apprentissage, de mémoire). Les dommages sont dépendants de la dose consommée. Pour le tabac les effets sont bien connus: cancer des voies aéro-digestives supérieures, pulmonaires, vessie, troubles respiratoires, athérosclérose et maladies cardiovasculaires. Pour le cannabis, une atteinte globale cognitive avec altération du quotient intellectuel (jusqu’a 8 points de QI), troubles de la mémoire, de l’attention, syndrome amotivationnel, troubles psychiatriques (troubles anxieux, dépression ) et psychotiques (schizophrénique) sont constatés.
Un des enjeux majeurs de l’addictologie est d’augmenter la sensibilisation du grand public et des professionnels ainsi qu’améliorer leur formation. Selon l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies, il y a de nombreux éceuils au sein du corps médical. Ces derniers pénalisent la qualité de l’intervention, notamment au niveau de la médecine générale qui est la porte d‘entrée la plus fréquente dans le soin et dans la prise en charge des addictions:
– le faible niveau de la formation initiale des praticiens n’est pas compensée par les actions de formation continue, elles-mêmes insuffisantes et cantonnées, pour l’essentiel, au sevrage tabagique
– le cloisonnement des différents niveaux du soin et de l’accompagnement : dispositif de premier recours, interventions du secteur médico-social, hôpital
– une couverture territoriale hétérogène des réseaux de santé en addictologie
– l’absence de lisibilité de la médecine générale dans le dispositif addictologie que traduit sa relégation, par les pouvoirs publics, dans les réseaux de santé, eux-mêmes en grande difficulté.
L’addictologie est ainsi une spécialité qu’il est nécessaire et urgente de développer au niveau des soignants et du système de soin pour le dépistage et la prise en charge précoce des patients ainsi que la prévention en matière de santé publique.
Texte : esanum / pg
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