Nous étions dans le secteur de neurologie vasculaire. Les patients alors pris en charge présentaient pour la plupart des déficits permanents ou transitoires dus à un accident vasculaire cérébral (AVC). Comme d’habitude, nous étions envoyés par groupe de 4-5 au lit d’un patient, afin de l’interroger, l’examiner et l’ausculter, pour trouver la/les pathologie(s) dont il souffre. Cette fois nous nous sommes rendus auprès d’une patiente, disons Mme S.
Lorsque nous sommes arrivés, nous l’avons saluée, nous sommes présentés. Sans aucune réaction de sa part. Son expression du visage ne semblait pas tranquille. Pour l’interrogatoire, la communication n’était donc pas possible. Nous nous sommes retrouvés désarçonnés, désarmés. Comment établir le contact avec la patiente ? D’autant plus qu’une infirmière qui passait nous a glissé en passant « Cette dame est sous calmants, sinon elle a des réactions agressives », ce à quoi a rajouté notre médecin en charge qui passait par là « Parfois vous savez, quand vous voulez obtenir des informations d’un patient, il faut vraiment aller jusqu’à l’énerver malheureusement. »…
Pendant quelques instants, qui ont paru interminables, nous nous sommes retrouvés bien penauds… Que faire ? Comment réagir ? Ce ne sont pas dans les livres que nous apprenons la conduite à tenir pour chaque patient, en tant qu’humain et (futur)médecin. Si Mme S. a des réactions agressives, c’est sûrement car elle est en souffrance. Certes nous ne la connaissions pas avant son arrivée ici, mais cela reste fort probable. Alors à quoi bon vouloir l’agacer ? De plus, par simple curiosité, car nous sommes seulement étudiants ? Ne sommes-nous pas dans ces études pour calmer la peine des gens, et non pas les traiter comme des animaux de foire ? Bien sûr, sur le moment, les pensées s’enflamment face au désarmement, le manque de recul par manque d’expérience.
Reprenant face, nous avons cherché des informations sur l’ordinateur à côté du lit. Ou plutôt nous avons tenté, en vain. Le logiciel nous était inconnu et nous ne voulions pas risquer de faire disparaître ou modifier les données.
Nous nous sommes donc retournés vers Mme S, notre patiente, et avons recommencé notre présentation. Pouvait-elle seulement nous entendre ? Nous voir ? Nous comprendre ? Pas de réaction. En l’appelant, plus fort, un petit grondement. Très bien, elle pouvait nous entendre. Nous avons repris un peu confiance alors et lui avons demandé de nous donner son identité et si elle savait ou elle était, pour son orientation et la rassurer. Elle était très confuse. Faute à l’AVC ou aux calmants ?
Nous avons poursuivi ensuite par quelques tests tant bien que mal, lorsqu’elle reprenait conscience, par à-coups (serrer la main, sentir le toucher/ une petite douleur), puis avons essayé de tester les réflexes; ce n’est pas évident lorsque la personne est perdue, ne peut participer. A ce stade, il est encore impossible de connaître précisément les souffrances de Mme S., cela reste frustrant à vrai dire. Non pas pour la science, la soif de connaissance, mais pour la patiente elle-même que l’on souhaite pouvoir accompagner et aider.
Cet examen censé nous orienter vers une atteinte, un tableau clinique nous a plutôt laissés désorientés. Cela arrive, et il est bon de déjà s’y confronter en tant qu’étudiant, afin de pouvoir y resonger, et mieux savoir comment réagir quand nous serons face à un cas similaire à celui de Mme S. .
Partir en Erasmus pendant des études de médecine c’est possible ! Lucie, étudiante en troisième année de médecine (FGSM3) a quitté la France en octobre pour étudié 2 semestres à Leipzig. Depuis son départ elle nous raconte chaque semaine ses aventures. Au fil de ses récits Lucie nous partage des expériences souvent dépaysantes, qui prouvent que la pratique médicale est différente d’un pays à l’autre.
Les autres chroniques de Lucie sont à découvrir : ici !