Cas clinique : Dyspnée inexpliquée : une découverte surprenante et un cas potentiellement mortel
Un patient de 82 ans se présente avec une détresse respiratoire sévère et d'autres symptômes. La cause est difficile à trouver. Qu'est-ce qui pourrait se cacher derrière ces troubles ?
Un cas mystérieux de troubles respiratoires
Un homme de 82 ans s'est présenté aux Urgences avec des nausées, des vomissements, des vertiges et des difficultés respiratoires. L'anamnèse incluait les diagnostics suivants :
- Hypertension artérielle
- Hypothyroïdie
- Prédiabète
- Hyperplasie bénigne de la prostate
- Vertiges et anxiété
Lors de l'examen initial, le patient a été interrogé sur la présence de douleurs thoraciques, de céphalées, de douleurs abdominales, de palpitations, de toux ou de fièvre, mais il a déclaré n’avoir aucun de ces symptômes. Aucun gonflement n'a été constaté au niveau des chevilles. Il n'a pas non plus subi d'intervention chirurgicale importante par le passé. Le patient ne présentait ni abus d’alcool ni de drogues, et n'avait aucune allergie médicamenteuse. Au moment où il s'est présenté aux urgences, il prenait les médicaments suivants :
- Amlodipine
- Clonazépam
- Lévothyroxine
- Tamsulosine
L'examen physique a révélé une détresse respiratoire marquée, avec des signes de suffocation, de nausées et un stridor (sifflement respiratoire). La saturation en oxygène était déjà tombée à 90 %, et le patient présentait une tachycardie avec une fréquence cardiaque de 120 battements par minute. L'auscultation des poumons a révélé des râles crépitants à grosses bulles. Les examens du système gastro-intestinal, neurologique et cardiovasculaire étaient toutefois sans particularité. En raison de l'aggravation de la dyspnée, le patient a dû être intubé et placé sous ventilation mécanique immédiatement.1
La laryngoscopie effectuée par la suite n'a pas permis d’expliquer les symptômes, car aucune anomalie n’a été détectée. Le scanner thoracique réalisé par la suite a permis d'exclure une embolie pulmonaire.1
Résultats des examens :
Image 1 : Scanner thoracique1
Image 2 : Scanner thoracique1
Le scanner a révélé une atélectasie presque complète du lobe inférieur gauche et un œsophage distendu. L'étape suivante a consisté en une gastroscopie pour approfondir le diagnostic.
Résultats de la gastroscopie :
Image 3 : Gastroscopie1
Quel est votre diagnostic de suspicion et quel traitement proposez-vous ?
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L'examen a révélé que le patient, âgé de 82 ans, souffrait d'un bézoard œsophagien situé dans l'œsophage inférieur. Il n'a pas été possible de retirer le bézoard, ni à l'aide d’une pince à extraction (Raptor), ni avec une pince de préhension (Talon). Une bronchoscopie a été effectuée et a révélé des sécrétions purulentes et des résidus alimentaires dans les deux poumons.
En raison de l'âge avancé du patient et des comorbidités, aucune intervention chirurgicale n'a été envisagée dans un premier temps. Le traitement a consisté en un lavage direct du bezoard œsophagien avec des liquides gazeux (Coca-Cola) mélangés avec des enzymes pancréatiques (KREON). A ce moment-là, le patient était intubé par voie endotrachéale, ce qui minimisait le risque d'aspiration trachéale. Le traitement a été administré pendant 4 jours au total (4 x par jour (355 ml) de Coca-Cola et 4 capsules de KREON). Cela a entraîné une dissolution complète du bézoard œsophagien. Malheureusement, une œsophagite avec des ulcérations circonférentielles a persisté. Une hernie hiatale de 5 cm est également apparue. Une biopsie a permis d'exclure une œsophagite à éosinophiles.1
Résultat après le début du traitement (5e jour) :
Image 4 : Résultats au 5e jour après le début du traitement1
L'état du patient s'est progressivement amélioré, de sorte qu'il a pu être sevré avec succès de la ventilation mécanique le 6e jour après le début du traitement. À sa sortie, la manométrie œsophagienne à haute résolution a révélé une achalasie de type I. Le patient a reçu des inhibiteurs de la pompe à protons en plus de son traitement précédent, ainsi que des rendez-vous pour un suivi ambulatoire, pour un diagnostic ultérieur et pour le traitement de l'achalasie et de l'œsophagite.1
Rare et potentiellement mortel : bézoard œsophagien
Ce phénomène rare se caractérise par la formation d'une masse ou d'un corps étranger dans l'œsophage. Dans certains cas, un bezoard œsophagien peut être asymptomatique. Chez ce patient de 82 ans, le bézoard œsophagien a mis sa vie en danger en raison de l'obstruction des voies respiratoires supérieures.1
- Urlapu KS. et al. (2024). Severe Airway Obstruction Caused by Esophageal Bezoar with Coca-Cola and Creon (Pancrelipase) in a Patient with Underlying Achalasia: A Comprehensive Case Report. Case Rep Gastrointest Med. 2024 Jul 27;2024:2081040.