Le dompéridone est une substance antagoniste de la dopamine. Celle-ci bloque en particulier son effet au niveau des récepteurs D2 périphériques de la dopamine, et en cela elle augmente la motilité gastrique et bloque l’effet émétique au niveau de l’area postrema située en dehors de la barrière hémato-encéphalique. En France, depuis 1980, il est donc largement utilisé pour diminuer les sensations de nausées et les vomissements et d’autres symptômes digestifs communs. Cependant, depuis avril 2014 l’EMA (European Medicines Agency) recommande son utilisation stricte aux nausées et vomissements. En 1986, sa forme injectable avait déjà été retirée du marché à cause de ses effets cardiaques néfastes utilisée à haute dose chez les patients cancéreux.
L’emploi de cette molécule est donc souvent remis en question et associé à des risques cardiaques élevés, notamment par cette étude récente. Toutefois, dans leur étude, il y a un point non-négligeable qui n’est pas mentionné, et qui pourrait également être corrélé à la survenue des arrêts cardiaques : les mécanismes de stress et de dépression.
En effet, celui-ci crée un biais de confusion dans l’étude des chercheurs, car les personnes incluses dans l’étude sont des patients recevant du dompéridone avant les recommandations de l’EMA de 2014, sont donc des personnes souffrant de nausées et vomissements, mais aussi de reflux gastro-oesophagien (« remontées acides ») et de brûlures d’estomac, qui sont souvent causés par des mécanismes de stress voire de dépression et de la somatisation* qui les suit.
Or, le stress et les sentiments de colère déclenchent la libération de Noradrénaline dans le corps, ce qui provoque une vasoconstriction et augmente la pression sanguine, contre laquelle le cœur doit pomper encore plus fort. De plus, le stress et en particulier la dépression (liée elle aussi étroitement au stress), en activant les systèmes d’alarme par l’hypothalamus et le cervelet, font libérer des hormones régulatrices telles le cortisol, et encore l’adrénaline et la noradrénaline, ce qui va avoir un impact sur les systèmes sympathique et parasympathique du corps. Or, l’activité cardiaque est dictée par ces systèmes nerveux couplés, et une désorganisation de ceux-ci augmente la probabilité de maladies cardiaques, voire d’arrêt cardiaque. D’ailleurs, un patient en cardiologie atteint de dépression présente un risque 3 fois plus élevé de succomber à un arrêt cardiaque qu’un autre patient de ce service.
Cette étude sur le dompéridone lié au risque d’arrêt cardiaque présenterait alors un important biais de confusion et les arrêts cardiaques observés pourraient donc être plutôt en lien avec la pathologie primaire (stress, causant des problèmes gastriques et menant à la prescription de cette molécule) qu’avec ce médicament ne traitant pas le fond de ce trouble et sa somatisation…
*somatisation = conversion de troubles psychiques en symptômes fonctionnels corporels
Sources :
-Estimating the number of sudden cardiac deaths attributable to the use of domperidone in France, C.Hill, P.Nicot, C. Piette, K. Le Gleut, G. Durand et B. Toussaint, Pharmacoepidemiology and Drug Safety (2015), doi: 10.1002/pds.3771.