Le cadre règlementaire qui s’impose à la téléconsultation vient d’être assoupli par Olivier Véran. Les patients peuvent désormais être remboursés même s’ils téléconsultent un praticien installé hors de leur territoire. La crise sanitaire actuelle donne une nouvelle légitimité aux plateformes de téléconsultation et booste leur activité. Médecins salariés, consultations en présentiel… Ce nouveau mode d’exercice de la médecine n’est pas toujours l’antichambre d’une ubérisation de la santé.
À l’origine, la téléconsultation était réservée au médecin qui l’utilisait avec ses propres patient, reçus en consultations «physiques» par ailleurs. Mais certaines exceptions prévues par la législation ont ouvert une brèche dans ce cadre très strict. Parmi celles-ci, le cas où le patient estime que son médecin traitant ne lui propose pas de rendez-vous dans un délai «compatible avec son état de santé». Au vu de l'attente moyenne avant l'obtention d’un rendez-vous auprès d'un généraliste (6 jours), ce cas n’a plus rien d’exceptionnel.
Dans l’univers émergent de la téléconsultation, des plateformes avec des fonctionnements très différents ont vu le jour. Certaines se contentent de fournir une interface à des médecins libéraux qui téléconsultent depuis chez eux. MEDADOM a opté pour un modèle radicalement différent.
«La plateforme est adossée à un centre médical partenaire, dans le XVIIe arrondissement de Paris. Elle fonctionne habituellement grâce à une quinzaine de médecins qui partagent leur temps entre consultations traditionnelles et téléconsultations. Ils peuvent téléconsulter depuis le centre. L’avantage, c’est qu’ils se retrouvent, échangent leurs expériences, leurs questionnements. C’est fondamental, car il n’existe pas encore de recommandations cliniques spécifiques pour les téléconsultations.» explique le Dr Yann Kieffer, directeur médical adjoint.
Chez MEDADOM, tous les médecins sont salariés. Certains ont une activité libérale par ailleurs, et téléconsultent avec des patients qu’ils reçoivent aussi dans leurs cabinets. «Au final, rares sont ceux qui ne font que de la téléconsultation.» précise le Dr Kieffer. Activité hybride, relations inter-professionnelles de qualité… Pour cette plateforme, la dimension humaine est aussi importante que la technologie.
En temps normal, les motifs des téléconsultations sont les pathologies bénignes aiguës : cystites, angines, lombalgies, etc... Mais avec le Covid-19, la fréquentation de la plateforme a explosé, passant en moyenne de 150 demandes quotidiennes à plus de 600.
Il s’agit soit de patients qui ont des difficultés pour voir leur médecin traitant, soit de téléconsultations directement liées au Covid-19 (60 % des demandes). Typiquement, les appelants sont des personnes angoissées, qui présentent certains symptômes et ne savent pas si elles doivent se rendre aux urgences. «En temps normal, les patients sont assurés d’avoir un médecin en ligne dans les 10 minutes. Le délai ne s’est pas allongé malgré cet afflux car MEDADOM a embauché d’autres médecins qui s’étaient rendus disponibles. Tous les cas que nous traitons, ce sont autant d’appels en moins pour le 15 qui est submergé.» témoigne le Dr Kieffer. À noter : la téléconsultation, au même prix qu’une consultation classique, est intégralement remboursée.
MEDADOM a récemment déployé en Ile-de-France plus de 150 bornes médicales connectées, conçues par les médecins et installées dans des pharmacies. 100 autres sont déjà commandées mais les livraisons souffrent des retards liés au confinement. Ces bornes sont équipées de matériels connectés intuitifs, utilisables par le patient ou par un assistant (généralement le pharmacien). Prise de constantes, otoscopes, dermatoscope, … le médecin dispose ainsi des éléments cliniques dont il a besoin. Pour les pharmaciens, ces bornes permettent d’obtenir un avis médical immédiat en cas de symptomatologie inquiétante, ou simplement un renouvellement d’ordonnance.
Les médecins de MEDADOM sont pour l’instant pleinement mobilisés contre le Covid-19. Mais le Dr Kieffer réfléchit à élargir le champ de la téléconsultation, qui pourrait être déployée en Ehpad ou encore en milieu carcéral. MEDADOM souhaite aussi ouvrir de nouveaux centres hors Ile-de-France. Toujours avec le même esprit : la téléconsultation ne se pose pas en rivalité à l’activité des généralistes mais peut combler les failles du dispositif d’offre de soins.