Frédéric Adnet est professeur agrégé de Médecine d'Urgence et chef des Urgences de l’Hôpital Avicenne et du SAMU 93. À la fois chercheur et médecin, il fait régulièrement le point sur la Covid-19. Après 46 numéros d'une Foire Aux Questions (FAQ) quotidienne, il publie désormais une newsletter. Nous la reproduisons ici avec son aimable autorisation.
Sa FAQ a connu un succès phénoménal. À l'origine destinée aux professionnels de son service, elle est maintenant traduite en plusieurs langues. Dans son interview, Frédéric Adnet revient sur ce succès et explique son attachement à l'Evidence-based medicine.
Frédéric Adnet est également l'auteur de l'ouvrage Les Fantassins de la République - Urgence COVID, un printemps en enfer, paru en octobre 2020.
INDEX et liste des FAQ / Newsletters
Nous avions vu, et c’est normal pour une zoonose, que beaucoup d’espèces du règne animal pouvaient non seulement être infectées par le SARS-CoV-2 mais aussi le transmettre. Citons notamment les chiens, les chats, les furets, les visons, les singes, les tigres, les lions etc. (cf. newsletters n°1, n°2, n°14, n°27 et n°31).
Eh bien... On découvre un autre réservoir animal qui semble plutôt massif, en l’occurrence les cerfs d’Amérique du Nord (Cerf de Virginie ou odocoileus virginianus). Jusqu’alors, on n’avait jamais mis en évidence de clusters d’animaux et donc une transmission inter-animale à l’état sauvage à grande échelle.
Des auteurs américains ont voulu le vérifier en prélevant 283 cerfs de Virginie dont 132 captifs (bioRxiv non encore reviewé, 6 novembre 2021).
Cette découverte peut nous inquiéter, car l’existence d’un réservoir animal actif, insensible à la vaccination par définition, laisse le virus circuler. Or la population du cerf de Virginie est estimée à plus de 25 millions d’animaux... Plus inquiétant encore, nous savons que le coronavirus utilise les hôtes animaux pour fabriquer et sélectionner des nouveau variants.
Bon, n’oubliez pas le masque au Zoo !
[Merci au Dr. Axel Ellrodt]
Les myocardites post-vaccinales, ou myocardites comme effet secondaire de la vaccination, déchaînent les foules. Nous avons vu qu’il existait un léger sur-risque chez les personnes vaccinées par rapport à la population générale, mais un sous-risque par rapport à la population Covid-19+ (cf. newsletters n°57 et n°58).
Qu’en est-il pour la France ? Une enquête cas-témoins EPI-PHARE issue de l’assurance maladie et de l’ANSM met les points sur les i ! (EPI-PHARE – Myocardite et péricardite après la vaccination Covid-19, 8 novembre 2021).
À partir du système national des données de santé, les cas de patients atteints de myocardites hospitalisées (N=919) ont été appariés à 10 témoins (N=9.190). On a pu ainsi comparer les patients exposés ou non exposés à la vaccination.
Bon, il va encore falloir ramer contre les flots de désinformation !
La question est toujours d’actualité !
Nous avions vu que l’immunité naturelle semblait plus robuste que l’immunité post-vaccinale dans une étude israélienne (cf. newsletter n°59). Et voilà que les américains disent l’inverse (Morbidity and Mortality Weekly Report, 5 novembre 2021) !
En analysant des patients hospitalisés pour des symptômes ressemblant à ceux de la Covid-19, les chercheurs ont pu vérifier si le diagnostic de Covid-19 était différent entre :
L’enquête a été effectuée dans 187 hôpitaux de 9 États américains. Elle a inclus 201.269 patients. Finalement, l’effectif du groupe «patients anciennement infectés (et non vaccinés)» était de 1.020 patients et le groupe des vaccinés (sans trace d’ancienne infection) était de 6.328. La comparaison des deux groupes (vaccinés vs. anciens malades) a été calculée après appariement multiples.
Ce résultat peut s’interpréter comme une immunité plus solide procurée par le vaccin par rapport à l’immunité naturelle. Le débat n’est donc pas fini !
Nous avons vu que la Covid-19 pouvait être un facteur aggravant d‘autres pathologies aiguës comme les AVC ou la chirurgie (cf. newsletters n°4 et n°47). Qu’en est-il des patients victimes d’un infarctus du myocarde à la phase aiguë (STEMI) et atteints de la Covid-19 ? C’est sur cette problématique que se sont penchés des chercheurs américains, dans une analyse rétrospective (JAMA, 29 octobre 2021).
Après appariement, ils ont isolé :
La Covid-19 semble bien être un facteur aggravant majeur de pathologies aiguës menaçant le pronostic vital. On est quand même étonné par des taux de mortalité inhabituels pour le STEMI dans cette étude.
Nous l’avions annoncé, les résultats de l’essai RECOVERY sur le traitement par aspirine étaient négatifs (cf. newsletter n°57). Les résultats complets viennent d’être publiés (Lancet, 7 novembre 2021).
Pourtant l’idée n’était pas si bête : la Covid-19 est une maladie thrombogène et les accidents thromboemboliques impactent le pronostic. Proposer un antiagrégant plaquettaire à titre systématique pouvait, à l’époque, laisser espérer une diminution de la morbidité et de la mortalité de cette maladie.
Déjà qu’avec l’héparine les résultats ne sont pas clairs du tout… On ne s’étonne pas que, finalement, l’aspirine ne fasse pas mieux !
Bon maintenant, il faut se concentrer sur les antiviraux.