Covid-19 : à chaque jour ses réponses, par le Pr Adnet (FAQ N°40 - 5 mai)
Le patient zéro français n'était pas si loin... Déconfinement en vue, les Français se relâchent : plus de masques mais moins de distance sociale et plus de temps passé dehors. Les soignants des services d'urgences sont très exposés. Maladies inflammatoires, un facteur de risque ? Sérothérapie, un résultat décevant. Merci au Pr Adnet pour cette FAQ Covid-19 du 5 mai !
Depuis le 12 mars, le Pr Frédéric Adnet - professeur agrégé de Médecine d'Urgence, chef des Urgences de l’Hôpital Avicenne et du SAMU 93 - fait régulièrement le point sur le Covid-19.
Épidémiologie, études, clinique... Nous reproduisons ici, avec son aimable autorisation, les actualisations de cette «Foire aux questions».
INDEX et liste des FAQ
FAQ N°40 (5 mai)
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Monde : 76.300 nouveaux cas hier. 3.584.322 cas confirmés (décès 251.580, guérisons 1.168.030) dans 187 régions ou pays.
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France : 658 nouveaux cas hier. 169.583 cas confirmés, 25.204 décès et 51.476 guérisons.
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Italie : 1.200 nouveaux cas hier. 211.938 cas confirmés, 29.079 décès et 82.879 guérisons.
(Source : Johns Hopkins University)
COVID, le patient zéro
On a trouvé le patient 0 !
Il était admis que le premier cas COVID-19 en France provenait d‘un touriste chinois revenant de Wuhan le 24 Janvier 2020.
Une équipe de l’hôpital Avicenne (mon hôpital !) a fait une découverte surprenante.
- En ré-analysant par PCR des prélèvements nasopharyngés (qui avaient été congelés) de patients hospitalisés en réanimation pour pneumopathie entre le 2 décembre 2019 et le 16 Janvier 2020, ils ont découvert un patient positif SARS-CoV-2 parmi 14 prélèvements.
- Il s’agissait d’un poissonnier habitant Bobigny (Seine-Saint-Denis) de 42 ans. Son fils avait présenté un syndrome grippal peu de temps auparavant.
- Il avait été hospitalisé le 27 décembre pour une hémoptysie en rapport avec une pneumopathie fébrile.
- Les prélèvements de l’époque étaient négatifs (forcément !). L’évolution a été favorable.
La Seine-Saint-Denis nous étonnera toujours !
[Merci au Pr. Yves Cohen]
COVID et déconfinement
La réussite du déconfinement «progressif» repose sur l’adhésion de la population aux mesures barrières (masque, distanciation).
Une enquête Ipsos/Datacovid sur 5.000 personnes révèle un certain relâchement de la population française avant la date de déconfinement (Ipsos/Datacovid, 2 mai 2020).
- Le nombre de personnes déclarant rester confinées diminue de 2% en une semaine (94 à 92%).
Par contre, l’usage du masque augmente de manière sensible (26%, +5%).
- C’est en Île-de-France que le confinement est le mieux respecté (1h04 min de sortie par jour en moyenne, + 5 min en une semaine).
- En revanche, le comportement se relâche nettement en Franche-Comté (1h27 min, + 24 min), dans les Pays de la Loire (1h30 min, + 24 min) et dans le Centre-Val de Loire, lanterne rouge du classement (1h41 min, + 28 min).
- Le nombre moyen de personnes rencontrées avec une distanciation de moins d’un mètre augmente aussi passant de 4,2 à 5,8 en une semaine.
[Merci au Dr. Axel Ellrodt]
COVID et soignants
Être soignant est un vrai facteur de risque pour le COVID-19 !
- Dans une étude comparative de suivi sérologique du personnel d’un service d’urgences, les auteurs ont proposé à 247 soignants une sérologie SARS-CoV-2 (American Journal of Emergency Medicine, 23 avril 2020).
- 12 (4,9%) se sont révélés positives.
- La prévalence de sérologies positives dans la population générale de l’État (Utah, USA) où se situe ce service était de 0,1%.
- Le rapport soignants/population générale pour la sérologie SARS-CoV-2 était donc de 49 !
[Merci au Dr. Patrick Miroux]
COVID et maladies inflammatoires
On se demande toujours si les traitements immunosuppresseurs ou anti-inflammatoires représentent un facteur de risque pour le COVID-19 (FAQ N°23, 33 et 37).
- Une étude descriptive a rassemblé 86 patients COVID-19+ ou COVID-19 suspects :
- avec une pathologie inflammatoire chronique (polyarthrite rhumatoïde, polyarthrite psoriasique, spondylarthrite ankylosante, psoriasis, RCH, Crohn),
- et recevant des traitements immunomodulateurs et/ou anti-inflammatoires (NEJM, 29 avril 2020).
- La fréquence d’hospitalisation était de 16%.
- Un traitement par corticoïdes, hydroxychloroquine, et méthotrexate était indépendamment associé à une hospitalisation.
- Il y eut sept patients nécessitant de l’oxygène et un décès.
- Les auteurs concluent que ce type de patients n’avaient pas de sur-risque par rapport à la population générale COVID-19+.
COVID et sérothérapie
On a vu que l’administration de plasma de patients guéris suscitait d’énormes espoirs thérapeutiques (FAQ N°11 et 14).
Une série chinoise relate un traitement par sérothérapie pour 6 patients COVID-19+ graves (The Journal of Infectious Diseases, 29 avril 2020).
- Les 6 patients ont eu une négativation de leur charge virale en 3 jours alors que cette négativation survenait chez seulement 21% d’un groupe (N=15) contrôle non randomisé.
- 5 patients (sur 6) du groupe transfusé n’ont pas survécu (83% de mortalité) tandis que la mortalité du groupe contrôle était de 93% (14/15).
- Les auteurs concluent que la sérothérapie a diminué rapidement la charge virale mais n’a pas amélioré le pronostic.
Pas encourageant !