Coronavirus : une start-up facilite la prise de décision

Un véritable brouhaha. Les recommandations concernant le coronavirus pleuvent de tous côtés. Pour le patient, pour le médecin, difficile de trouver des réponses claires. L'idéal, ce serait un arbre décisionnel avec une interface simplifiée. En France, c'est une start-up qui a discrètement relevé le défi.

Recommandations, conduites à tenir, mises à jours, points de situation… Trop d’informations, trop de sources différentes, la population s’y perd, les professionnels de santé aussi. Quand consulter ? Quelles précautions prendre ? Quels conseils donner ?

Pour apporter des réponses claires malgré une multitude de cas différents, l’idéal est un arbre décisionnel. Une solution proposée au Royaume-Uni par la NHS, ou encore en Suisse avec le CoronaCheck développé par l’Université de Lausanne. En France, c’est une start-up qui a relevé le défi.


Structurer l’information

« Notre directrice médicale, Anne-Laure Rousseau, est venue me faire part de l’anxiété des patients quant au coronavirus. Elle réfléchisait à la possibilité d’adapter l’information selon les situations personnelles. L'idée, c'était la surcharge ses salles d’attente, lieux de possible contamination, et d’orienter les patients graves vers le 15. Nous avons donc décidé de créer un site avec un arbre décisionnel pour centraliser les informations et les diffuser plus clairement à la population et aux médecins. » témoigne Alexandre Lebrun*, CEO de l’entreprise Nabla. En un week-end l'équipe composée d'une vingtaine d'ingénieurs et de médecins a développé c19.info.
 

Anne-Laure Rousseau est médecin vasculaire à l’Hôpital Européen Georges Pompidou. Elle résume le problème : «Les autorités sanitaires produisent beaucoup d’information mais n’ont pas toujours le temps de la structurer. Leur tâche est immense. Quant au numéro vert, il n’a pas vocation à recevoir les appels des personnes qui ont des questions médicales liées à leur propre situation

Le site c19.info comporte notamment un questionnaire destiné au grand public. L’interface est simple : des questions avec réponses en OUI/NON évaluent la probabilité d’infection en fonction d’éventuels symptômes, d’un séjour en zone à risque ou d’un contact avec une personne contaminée. 

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Un outil pour les médecins

Les médecins sont censés relayer les informations auprès des patients, mais eux-mêmes peinent à s’y retrouver. Sur le papier, les critères qui doivent conduire à orienter vers le 15 ou à conseiller l’isolement d’un patient sont simples. Mais en réalité les médecins sont confrontés à une infinité de cas différents, et les préconisations évoluent rapidement. Nabla a donc créé sur c19.info un espace dédié aux professionnels de santé. «Pour l’instant, nous centralisons les textes officiels, nous les rendons plus accessibles pour tous, mais nous voulons ensuite développer un arbre décisionnel pour aider les médecins.» explique la Dre Rousseau.

Cet arbre décisionnel s’étoffera au gré des recommandations du ministère de la Santé. «Pour les médecins libéraux, beaucoup de cas ne sont pas très clairs. Si le patient tousse, est fébrile, et a un diabète, les recommandations seront-elles identiques ? Cela va être discuté entre les les médecins libéraux et hospitaliers et les autorités sanitaires dans les prochains jours. Un arbre décisionnel aura tout son sens et pourra être un outil de référence.»

Parce qu’il est porté par une structure privée, c19.info se doit d’être irréprochable quant à la validité des informations diffusées. La Dre Rousseau s’appuie sur les compétences d’un infectiologue, et veille aux mises à jour du site dès la parution d’une nouvelle recommandation du ministère de la Santé ou de la DGS. «Hors de question de véhiculer des infos qui ne seraient pas actualisées» affirme M.Lebrun. Un défi de taille au vu du développement de l'épidémie, puisque la notion de «zone à risque» devient fluctuante et que les «cas confirmés» ne constituent qu'une partie des personnes réllement contaminées.    


À quand une version officielle ? 

Alexandre Lebrun indique que l’initiative a été plutôt bien accueillie par certains membres du ministère de la Santé, la DGS ou encore l’AP-HP, et que les retours des médecins sont positifs. «À tout moment nous sommes prêts à partager notre algorithme avec l’ensemble des autorités pour qu’elles puissent l’intégrer à leur site.» précise-t-il.

Faute d’un relais officiel la diffusion de c19.info est pour l’instant limitée, passant essentiellement par les réseaux sociaux et le bouche à oreille. En une dizaine de jours, plus de 50 000 personne se sont pourtant connectées. Mais impossible de connaître le nombre de médecins utilisateurs, car Nabla ne récupère aucune donnée personnelle et toutes les données sont anonymes.

La question de la protection des données est un point crucial pour Nabla qui développe actuellement une plateforme de santé personnalisée à destination des patients. Le lancement est prévu pour la fin de l’année. Pour la start-up, déjà considérée comme une pépite de la French Tech, les efforts déployés pour participer à la lutte contre le coronavirus sont aussi un moyen de faire connaître ses compétences et son projet.

 


* Alexandre Lebrun est déjà un vétéran du machine learning. Passé par Polytechnique et Telecom, il a d’abord créé VirtuOz, start-up revendue au géant de la traduction Nuance. Puis il a lancé Wit.ai - solution permettant aux développeurs d’intégrer un assistant vocal dans les applications - rachetée par Facebook en 2015. Il a alors intégré le Facebook Artificial Intelligence Research, côtoyant l’élite de l’intelligence artificielle dont le français Yann LeCun. Il se consacre désormais au développement de Nabla, créée en 2018 avec Delphine Groll et Martin Raison.

 

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