Contexte
De 7 à 47% des patients seraient mécontents de la procédure à cause de l’apparition d’un syndrome post-cholécystectomie, principalement un reflux duodéno-gastrique (RDG) avec gastrite par reflux biliaire. Entre 20 et 85% des patients présenteraient un RDG pathologique dans les 6 mois suivant une cholécystectomie. Le RDG pathologique serait un facteur de développement de l’ulcère gastro-duodénal (UGD). Les données existantes proviennent d’études de sous-population, mono-centriques, ou régionales et ne sont pas représentatives d’une population globale.
Étude et méthodes
Une étude rétrospective de cohorte publiée dans le journal Scientific Reports (DOI: 10.1038/srep30702) a été menée sur la population Taïwanaise, afin d’évaluer la relation entre cholécystectomie et risque subséquent d’UGD. Les 5209 patients adultes du groupe d’étude ont subi une cholécystectomie pour cause de calculs biliaires symptomatiques entre 2002 et 2008, sans diagnostic d’UGD dans la période de 3 ans avant l’opération (date index). Les 15627 patients du groupe contrôle n’ont pas d’historique de calculs biliaires et n’ont pas eu de cholécystectomie avant ni durant la période de suivi de 5 ans, ainsi que d’UGD 3 ans avant la date index. Les patients ont été suivis jusqu’à 5 ans pour un éventuel diagnostic avéré d’UGD (un premier et unique diagnostic en cas de suspicion n’est pas pris en compte pour cette étude).
Résultats
Les patients de cholécystectomie sont plus à même de présenter des comorbidités de diabète (25.5 vs. 16.9%), d’hypertension (49.1 vs. 37.4%), de maladie coronarienne (22.7 vs. 15.1%), d’hyperlipidémie (33.4 vs. 26.3%), d’obésité (1.9 vs. 1.0%), de syndrome lié à l’abus/dépendance à l’alcool (0.8 vs. 0.3%) et de troubles liés au tabagisme (4.8 vs. 1.8%) que les patients contrôles (p<0.001). L’incidence de l’UGD à 5 ans chez les patients de cholécystectomie est de 12.94% contre 8.70% chez les patients contrôles (p<0.001), représentant un risque relatif brut HR=1.56. Après ajustement par les facteurs de comorbidité observés et non prise en compte des patients décédés durant le suivi, ce risque est évalué à 1.48. La différenciation des ulcères gastriques de duodénaux aboutie à un risque accru similaire chez les patients de cholécystectomie (risques ajustés HR=1.70 et 1.71, respectivement).
Conclusions
Les patients de cholécystectomie constituent une population à risque d’ulcère gastro-duodénal, indépendamment du type d’ulcère. Si le mécanisme impliqué est méconnu, il semble que le reflux duodéno-gastrique et une infection à Helicobacter pylori soient impliqués. D’autres études sont nécessaires dans lesquelles il serait intéressant de différencier les indications de la cholécystectomie (coliques biliaires, cholécystite, pancréatite) ainsi que de réaliser des biopsies gastriques afin d’identifier les cas de gastrite par reflux biliaire. Aussi, d’autres facteurs pourraient influer sur le risque d’ulcère peptique, comme une prédisposition génétique ou une mauvaise hygiène de vie. Malgré ces limitations, la présente étude permet de mettre en garde les cliniciens du risque d’ulcère peptique en cas de douleurs épigastriques persistantes ou de dyspepsie chez des patients de cholécystectomie.
Texte : jd / esanum
Photo : Alila Medical Media / Shutterstock
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