Depuis 1958 (réforme du plein temps), les hôpitaux du type CHU ont une triple mission de soins, de recherche et d’enseignement.
En 1958, le général de Gaulle de retour au pouvoir eut la formidable volonté politique de hisser la recherche et les technologies françaises à leurs plus hauts. Il crée alors les Centres Hospitaliers Universitaires avec un corps des Professeurs, Plein-temps Universitaires et Hospitaliers (PU-PH).
Ces derniers devront assurer — du moins en théorie — la triple fonction de soins, d’enseignement et de recherche. Leur statut comme pour les chefs de clinique leur permet de recevoir une double rémunération hospitalière et universitaire.
Dans le même temps, sous la pression de Jean Bernard, Jean Hamburger, René Fauvert et Georges Mathé, est créé l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM).
En mai 1968, la faculté de médecine de Paris éclate en treize entités. Les externes deviennent alors tous étudiants hospitaliers au prétexte d’un enseignement égalitaire, ce qui tirera en fait cette fonction vers le bas.
Plus tard, les « ordonnances Juppé » de 1995/96, les mises aux normes et les trente-cinq heures vont venir bouleverser l’organisation hospitalière. Conséquence : le surcoût des Récupération du Temps de Travail (RTT) est estimé à 3,5 milliards d’euros.
Pour compenser cette réduction du temps de travail, il faudrait créer 45 000 postes hospitaliers. Malheureusement l’hôpital suradministré n’est plus vraiment géré et va devenir un navire incontrôlable, promis à un naufrage annoncé.
En 2002, c’est l’Internat qui subit le même sort que l’Externat. Il est remplacé par un simple cursus (ECN) qui reçoit 100 % des étudiants en fin de cycle.
Les concours favorisaient un élitisme nécessaire à la qualité pour une grande médecine française, mais celle-ci était trop rebelle et les politiques « en coupant les têtes » ont pesé lourdement sur cette qualité que les autres pays nous enviaient.
Cette année les internes dont on considère le niveau insuffisant ; deviennent des étudiants en formation et doivent respecter les 45 h, le repos compensateur et quitter le giron de l’Hôpital 2 demis journées par semaine.
Le personnel hospitalier français compte plus d’un million deux cent mille salariés. Près de 40 % sont des personnels administratifs. L’absentéisme y est marqué avec 11 % des jours ouvrés, ce qui représente presque un mois par année d’activité. Les crédits affectés à leur remplacement représentent 5 % de la masse salariale.
On compte 100 000 médecins, dont 6 000 PU-PH. Toutefois, nombre de postes restent vacants en chirurgie et en anesthésie, car insuffisamment rémunérés face aux obligations. Cela entraine donc le recrutement de 30 000 non-titulaires médecins qui ne sont pas issus de cursus diplômant.
Les pleins temps sont écartelés entre les tâches administratives, les réunions de Formation Médicale Continue (FMC) et celles de la Commission Médicale d’Établissement (CME).
Les congrès, la formation des internes, la présence et les communications dans les sociétés savantes sont incontournables, mais sont un poids, faute de temps, pour maintenir la qualité des soins.
La bonne marche des services et la gestion d’une clientèle privée compliquent encore un peu plus les emplois du temps et l’évolution de leurs carrières.
L’assistance publique – hôpitaux de Paris (APHP) compte aujourd’hui 39 hôpitaux regroupés en 12 groupes hospitaliers.
Créée par la loi du 10 janvier 1849, l’APHP est aujourd’hui dirigée par Martin Hirsch. Elle a souvent été dirigée par des médecins. Le directeur général est nommé par décret en Conseil des ministres. Le maire de Paris préside le conseil d’administration.
100 000 personnes environ travaillent pour cette institution, ce qui en fait l’employeur le plus important d’Ile-de-France. Celles-ci se répartissent en trois catégories assez nettement séparées : le personnel médical (PM), le personnel non médical soignant et le personnel non médical administratif.
Doté d’un budget de 7,3 milliards d’euros, l’établissement est régulièrement déficitaire. Il accuse une dette de 2,2 milliards d’euros, composée à 75 % par les charges de personnels.
Les plans-hôpitaux se sont succédé : 2002/2007/2012 avec les lois Hôpital, Santé, Patient, Territoires (HPST) de 2011, dite loi Bachelot et la loi santé Touraine 2016.
Des projets pharaoniques voient le jour : hôpital sud-francilien (HSF) : 110 000 mètres carrés plus gigantesques que les derniers nés que furent Strasbourg et Toulouse.
Il comporte 1100 chambres et 26 blocs opératoires. Les malfaçons et les surcoûts de réalisation le rendent largement déficitaire avant même son ouverture. Le bail de partenariat public privé devait durer 30 ans. C’est maintenant l’Hôpital Nord à Saint-Ouen qui est dans les starting-blocks…
Trop de strates administratives ont multiplié les acteurs et les rouages au détriment des soins dans les anciens hôpitaux. L’hôpital français est au bord de la rupture et on continue d’aller dans le mur faute de vision !
Retrouvez Bernard Kron, membre de l’Académie Nationale de Chirurgie, sur les ondes de Sud Radio (99.9 FM)