Face à une appendicite aiguë non compliquée – et dans le cadre d'une prise de décision partagée entre le patient et le praticien – il est raisonnable de considérer le traitement non opératoire comme une alternative sûre de première intention à l'appendicectomie. C’est ce que révèle une synthèse récemment parue dans le NEJM.
L'appendicite aiguë est la cause la plus fréquente de chirurgie abdominale en urgence. Le risque relatif de survenue moyen chez une personne est de 7 à 8%. Ce risque culmine entre 10 et 19 ans. Par ailleurs, en cas d'appendicite non traitée, le risque de complication est majeur : rupture, choc septique et décès. Traditionnellement, jusqu'à 80% des appendicites aiguës non compliquées sont traitées par une appendicectomie urgente.
Pour le choix d’un traitement médical, les avantages et les inconvénients de l'antibiothérapie seule par rapport à l'appendicectomie doivent être pris en compte. Les praticiens qui prescrivent l’antibiothérapie doivent évaluer les risques liés au traitement ambulatoire, la disponibilité de la filière de suivi (y compris de la part des chirurgiens viscéraux) et le retentissement du choix de la prise en charge (antibiothérapie vs chirurgie) sur la vie personnelle et familiale du patient. Le ressenti du patient face à une intervention chirurgicale est un autre élément à prendre en considération.
Trois grands essais multicentriques ont évalué la prise en charge opératoire par rapport à la prise en charge non opératoire de l'appendicite aiguë non compliquée, définie ainsi :
530 adultes ont été évalués sur une période de 5 ans.
Il a concerné 1552 adultes avec suivi des résultats à 90 jours.
1.068 enfants ont été suivis à un an d'évolution.
Les antibiotiques couvrant les bactéries aérobies à Gram négatif et anaérobies (tels que l'ertapénème ou la ceftriaxone + le métronidazole) doivent être administrés aux patients pour une intervention chirurgicale et non chirurgicale.
Les patients traités de manière non opératoire doivent poursuivre l'antibiothérapie avec le métronidazole + une céphalosporine de troisième ou quatrième génération ou une fluoroquinolone pendant 7 à 10 jours.
Le patient doit être informé sur les précautions strictes de retour à domicile et doit obligatoirement bénéficier d’une évaluation clinique dans les 24 à 48 heures.
Les indications pour une appendicectomie urgente incluent notamment une péritonite diffuse ou un sepsis et l'absence d'amélioration à 48 heures mais elles ne sont pas limitées à ces seules complications. En effet, tout doute sur l’efficacité du traitement médical doit faire consulter le patient en urgence.
Les facteurs de risque d'une réponse tardive à l'antibiothérapie, qui doivent inciter à renoncer à cette option, sont la présence d'une appendicolithe sur le scanner, la présence de liquide ou d'air extraluminaux, un âge supérieur à 45 ans, de la fièvre, des symptômes évoluant au-delà de 48 heures et une élévation initiale des marqueurs inflammatoires.
En l'absence de tout facteur de risque et chez un patient de moins de 45 ans sans risque identifié de complication (abcès, tumeur, perforation, sepsis, instabilité hémodynamique), un traitement non chirurgical avec des antibiotiques peut être envisagé. Seule condition : votre filière doit être parfaitement organisée, avec un protocole inter-service et multiprofessionnel partagé et validé par toutes les parties.
Références :
1- Talan DA, Di Saverio S. Treatment of Acute Uncomplicated Appendicitis. N Engl J Med 2021;385(12):1116-23.
2- Salminen P, Paajanen H, Rautio T, et al. Antibiotic therapy vs appendectomy for treatment of uncomplicated acute appendicitis: the APPAC randomized clinical trial. JAMA 2015;313:2340-8.
3- The CODA Collaborative. A randomized trial comparing antibiotics and appendectomy for appendicitis. N Engl J Med 2020;383:1907-19.
4- Minneci PC, Hade EM, Lawrence AE, et al; Midwest Pediatric Surgery Consortium. Association of Nonoperative Management Using Antibiotic Therapy vs Laparoscopic Appendectomy With Treatment Success and Disability Days in Children With Uncomplicated Appendicitis. JAMA 2020;324(6):581-93.
Liens d'intérêts
Le professeur Peschanski déclare les liens d'intérêts suivants :
- sur les trois dernières années : Vygon SA (consultant), Fisher&Paykel (symposium), AstraZeneca (symposium)
- sur les vingt dernières années :
Symposiums : Fisher&Paykel Healthcare , AstraZeneca, Lilly, Sanofi, Daiichi-Sankyo, HeartScape, The Medicine Company, Thermofisher, Roche Diagnostics
Boards : Bayer, AstraZeneca, Vygon SA, Portola USA, Sanofi, Boehringer Ingelheim
Congrès : Lilly, Sanofi, Vygon SA, Portola, Roche Diagnostics, Thermofisher
Fonds de recherche (non personnels) : Servier, Boehringer Ingelhei