Frédéric Adnet est professeur agrégé de Médecine d'Urgence et chef des Urgences de l’Hôpital Avicenne et du SAMU 93. À la fois chercheur et médecin, il fait régulièrement le point sur la Covid-19. Après 46 numéros d'une Foire Aux Questions (FAQ) quotidienne, il publie désormais une newsletter hebdomadaire. Nous la reproduisons ici avec son aimable autorisation.
Sa FAQ a connu un succès phénoménal. À l'origine destinée aux professionnels de son service, elle est maintenant traduite en plusieurs langues. Dans son interview, Frédéric Adnet revient sur ce succès et explique son attachement à l'Evidence-based medicine.
Frédéric Adnet est également l'auteur de l'ouvrage Les Fantassins de la République - Urgence COVID, un printemps en enfer, paru en octobre 2020.
INDEX et liste des FAQ / Newsletters
Notre angoisse réside dans l’apparition de nouveaux variants qui seraient résistants aux anticorps générés par une ancienne infection ou par le vaccin. Ces variants seraient synonyme de réinfections ou d’infections chez des patients vaccinés. Nous avons été rassurés par le variant anglais B.1.1.7, qui semble bien sensible aux vaccins et aux anticorps de sujets convalescents (cf.newsletters n°33 et n°38).
Nous sommes beaucoup plus inquiets quant au variant brésilien appelé P.1 ou 20J/501Y.V3 (slade phylogénétique B.1.1.28.1). Il serait beaucoup plus résistant aux anticorps de l’immunité naturelle à cause de mutations insérées dans la région «d’accroche» des anticorps sur la protéine (mutations E484K et K417T, cf. newsletter n°37). Ces nouveaux résultats ne vont pas nous rassurer (Lancet preprint, non encore reviewé - 1er mars 2021).
Pas rassurant !
Breaking news : Astra-Zeneca® annonce via l’agence Reuters® que son vaccin serait efficace contre ce variant brésilien (Reuters, 5 mars 2021) !
À suivre !
[Merci au Dr. Axel Ellrodt]
Nous soupçonnions que des prédispositions génétiques peuvent favoriser les formes graves de la Covid-19. Nous avons vu que parmi celles-ci l’appartenance au groupe sanguin A est associée aux formes graves de la maladie (cf. newsletter n°7). Nous commençons à comprendre pourquoi !
Des chercheurs ont remarqué que la région RBD (Receptor Binding Domain) de la protéine S du virus SARS-CoV-2 – connue pour s’accrocher au récepteur ACE2 afin d’envahir la cellule – possède aussi un site de reconnaissance pour les groupes sanguins (Blood Advances, 9 mars 2021).
On va mourir moins bête !
Nous avons vu que chez les patients guéris de la Covid-19 la stimulation immunitaire est très forte après l’injection d’une première dose (cf.newsletter n° 38). Deux études suggèrent que, probablement, une dose suffit.
Ces deux travaux suggèrent que l’on pourrait différer l’administration de la deuxième dose de vaccin chez les patients ayant déjà eu la Covid-19, voire ne pas l’administrer du tout !
[Merci aux Drs Marilucy Lopez et Axel Ellrodt]
La sérothérapie est un traitement qui est toujours proposé. Il qui consiste en l’administration de sérum de patients convalescents contenant les anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2. Les résultats, nombreux, sont plutôt mitigés voire négatifs (cf. newsletters n°16, n°30 et n°36).
Las… Une méta-analyse et une revue systématique viennent d’être publiées, et nous permettent d‘y voir plus clair (JAMA, 26 février 2021). Tous les essais comparatifs publiés ou en preprint ont été rassemblés. Au total 1.060 patients (issus de 4 essais randomisés) ont été inclus dans la méta-analyse et 10.722 patients provenant de 6 essais ont permis de faire l’analyse systématique.
En conclusion, l’analyse de l’ensemble des essais cliniques sur la sérothérapie dans le traitement de la Covid-19 ne révèle pas d’effet significatif sur le devenir des patients.
L’ivermectine (Stromectol®) est un antiparasitaire qui fait beaucoup parler de lui dans le traitement de la Covid-19. Ce médicament a montré in vitro une activité antivirale contre le SARS- CoV-2 dans des cellules de reins de singe. Des données observationnelles pouvaient suggérer un effet clinique chez l’être humain.
Dans un essai comparatif, l’effet de ce médicament sur la charge virale a été décevant (cf. newsletter n°37). Le premier essai clinique sérieux vient d’être publié et ses résultats sont négatifs (JAMA, 4 mars 2021).
Bon, encore beaucoup de bruit pour pas grand-chose ?
Triste fin pour ce qui fut quand même un espoir thérapeutique au tout début de l’épidémie… Après une revue systématique de la littérature, l'Organisation Mondiale de la Santé a publié ses recommandations internationales concernant l’hydroxychloroquine.
Ses conclusions : la molécule n’a que peu ou pas d’effet sur la mortalité, le taux d’admission à l’hôpital et l’infection due au SARS-CoV-2. L’hydroxychloroquine est par contre responsable d’une augmentation du nombre d’effets indésirables.
L’OMS se prononce donc contre l’utilisation de ce médicament et demande l’abandon de toute recherche, considérant que le niveau de preuve de son inefficacité a été atteint (BMJ, 2 mars 2021).